Double personnalité (Jean 8,37-45)

2022-08-03

Lire le texte

Le conflit s’envenime. Gravement. Et cela avec des mots qui, hors de tout contexte et sans recul, connaîtront un destin dramatique pour appuyer les animosités chrétiennes puis justifier les persécutions civiles contre les Juifs, jusqu’à l’antisémitisme systémique, halluciné et assassin du 20e siècle notamment (v. 44): «Votre père, c’est le diable…». Or, il n’y a là que rhétorique de circonstance et échange de maussaderies dont l’acrimonie ne doit pas faire écran: s’y exprime la déception de voir nombre de sympathisants juifs de la première heure se détourner finalement de l’enseignement de Jésus pour retrouver leurs fondamentaux et ceux qui n’avaient pas même pu entendre la prédication du Galiléen. Que ce soit du vivant de Jésus ou dans l’expérience de la communauté qui porte son évangile n’y change rien. Et la figure d’Abraham offre ici ancrage et références symboliques à cette réinscription. Dans ce jeu des références qui creusent des identités doubles et opposables, l’interpellation de Jésus (v. 43) vaut pour toutes et tous, jusqu’à aujourd’hui. A l’écho du mot dia-bolos utilisé après, il y a un risque de dissociation de soi, de fracture de la raison, de dissolution du sens lorsque la parole de Jésus est mésécoutée, galvaudée, dégradée. En chemin d’Evangile, y sommes-nous encore attentifs ou l’avons-nous également oublié pour d’autres références?

Blaise Menu

Prière:  

Père, nous t’en prions: viens recoller ce qui, en nous, se fissure et risque d’abîmer le lien à toi et ce faisant, de blesser la relation à autrui comme à nous-mêmes.