Culte novembre 2022 – Marc 3 : 1 à 12 – l’homme à la main sèche
Méditation par Anita Baumann, diacre Service EERV
Présence – Solidarités Région Morges-Aubonne


Introduction : ce matin, je vous propose de méditer plus particulièrement un passage biblique qui nous invite à réfléchir au regard que nous portons sur nous-mêmes et sur les autres. 
Cette question est souvent au cœur des entretiens et des temps de partage que nous vivons avec les personnes confrontées à des difficultés dans le cadre de notre Service Présence et Solidarité.  
Ces personnes témoignent de leurs difficultés, telles que : 
Perdre un emploi peu de temps avant la retraite ; recevoir sans cesse des réponses négatives ou pas de réponse du tout aux candidatures envoyées pour retrouver du travail ; voir s’accumuler les dettes ; être confrontés à un imprévu qui met en péril un budget déjà très limité ; se retrouver sans logement ; vivre en errance.     
Toutes ces situations ébranlent bien souvent les convictions des personnes ainsi touchées. 
D’autres groupes, proposés également par notre Service Présence et Solidarités, réunissent des personnes qui doivent affronter la maladie incurable d’un proche ; le décès d’un être cher ; un divorce ; les difficultés liées à la migration ; la solitude. Ces situations, et tant d’autres encore, mettent là aussi en péril les points de repère de l’existence. 
Ces points de repère, nous les évoquons aussi lors de nos rencontres chouettes qui réunissent des personnes de tous horizons, confrontées ou non à des situations difficiles, mais toutes motivées par l’envie de chercher ensemble les lumières de la vie qui permettent de continuer d’avancer malgré l’obscurité.  
Si, au sein de notre service, nous remettons aux hommes, femmes et enfants dans la précarité des aides d’urgence ; si nous cherchons ensemble les pistes qui pourraient mener vers des solutions plus durables ; nous veillons aussi à donner l’occasion aux personnes que nous accompagnons d’exprimer leurs forces ou leurs détresses spirituelles, spirituelles au sens large du terme, c’est-à-dire tout ce qui donne envie ou non de vivre, de lutter, de se relever. Cela touche aux questions liées à nos motivations, aux valeurs, au sens même de la vie et à la référence ou non à la transcendance, à une force divine. 
A ces forces ou ces détresses spirituelles, nous pouvons aussi ajouter celles qui tournent autour de l’identité.  
Comment est-ce que je me considère aujourd’hui ? 
Nous ne donnons pas toujours la même réponse à cette question car les situations vécues peuvent aussi, hélas, influencer le regard que nous portons sur nous-mêmes. 
Nous ne nous voyons pas forcément de la même manière lorsque nous connaissons des temps de réussite professionnelle ou lorsque, au contraire, nous ne pouvons plus nous référer à une telle fonction. Notre manière de nous considérer n’est pas non plus la même lorsque nous nous sentons intégrés ou au contraire marginalisés, incompris, oubliés ou encore lorsque l’âge modifie nos traits ou que la maladie sévit.  
Le texte biblique que nous allons méditer ensemble aujourd’hui nous invite à réfléchir à cette question de l’identité et au regard que nous posons sur nous-mêmes et sur les autres mais aussi à la manière dont Dieu nous considère. 
Lecture biblique : Evangile de Marc, chapitre 3, versets 1 à 12 
Méditation 
Nous connaissons toutes et tous les fameuses illusions d’optique ou doubles illustrations qui permettent de voir, à partir d’un seul dessin, plusieurs représentations. Au premier regard, nous avons l’impression de ne voir qu’une seule image puis en continuant d’observer, nous en découvrons encore une autre.     
Une telle expérience est aussi possible lorsque nous considérons notre identité et celle de nos semblables.   
Les impressions changent en fonction de l’éclairage, de l’angle à partir duquel nous regardons notre vie et celle des autres.  
Ce constat nous invite à nous demander ce qui, aujourd’hui, influence notre perception, qu’est-ce qui oriente notre regard, qu’est-ce qui attire notre attention ? 
Les réponses à ces questions nous permettent de discerner ce que nous considérons comme important, essentiel, ce qui donc, au final, nous guide. 
Nous n’avons pas la même considération, en effet, si nous pensons que la vie est un cadeau ou si nous avons l’impression, au contraire, que la vie est un fardeau. Considérer la vie comme un cadeau nous encourage à la regarder de manière plus positive. Nous sommes alors plus attentifs aux petits bonheurs de chaque jour. Nous sommes capables de discerner le beau et le bien même lorsque nous sommes confrontés à des situations difficiles. 
En revanche, si nous voyons la vie comme un fardeau, nous sommes beaucoup plus attentifs à ce qui ne va pas, à ce qui pèse, alourdit et assombrit notre existence. 
Ces impressions, bien sûr, sont influencées par ce que nous avons vécu dans le passé, par les personnes aussi qui nous ont entourés et qui nous ont encouragés ou non à regarder la vie du bon côté. 
Ces impressions sont aussi, bien évidemment, nourries par ce que nous sommes en train de vivre. Il est plus facile d’avoir une perception positive des choses lorsque nous vivons des temps heureux que lorsque nous marchons dans l’obscurité. 
La manière de regarder les événements, toutefois, influence notre façon de les vivre, notre façon d’affronter les difficultés.  
Et ce qui est valable pour notre façon de regarder la vie, l’est aussi pour la manière dont nous percevons notre identité et celle des autres.  

Nous pouvons nous considérer ou regarder les autres de tant de manières différentes. Tout dépend de l’éclairage que nous utilisons. 
Où est-ce que nous braquons notre projecteur ? 
Est-ce sur l’apparence ? L’âge ? La vie professionnelle ou familiale ?  
Est-ce le niveau d’étude ? L’éloquence ? La richesse ou la pauvreté ?  
Est-ce que les éloges ou les critiques nous influencent ?  
Ces différents éclairages déterminent la façon dont nous considérons notre vie et celles des autres. 
Nos sentiments peuvent aussi changer notre regard. Nous ne voyons pas la personne de la même manière si nous sommes remplis de méfiance, de colère ou si, au contraire, nous nous laissons guider par la tolérance. 
Pour les relations, comme pour la vie, c’est donc un peu comme pour ces fameuses doubles illustrations. Il y a plusieurs manières de considérer les gens et les choses. 
Le récit biblique que nous avons lu aujourd’hui évoque bien ces différentes manières de voir les gens et les choses.  
Dans l’histoire qui se déroule dans une synagogue le jour du sabbat, il y a plusieurs personnes.  
Il y a d’abord les pharisiens qui sont très attachés à la loi, aux ordonnances religieuses. Ils croient en Dieu et ils pensent que le plus important c’est de respecter les prescriptions inscrites dans les livres de la Torah. Les pharisiens regardent donc leur vie et celles des autres en fonction de ces critères.  
Lorsqu’ils voient arriver Jésus dans la synagogue, ils l’observent donc, lui aussi, pour voir s’il suit bien les prescriptions de la Torah, surtout en ce jour de sabbat où la loi religieuse prévoit de nombreuses interdictions.  
Ces pharisiens sont tout particulièrement attentifs à Jésus parce qu’ils ne savent pas que penser de cet homme qui attire les foules, qui parle de Dieu de manière peu conventionnelle et qui a déjà fait quelques entorses à la loi.  
Les pharisiens, qui épient Jésus depuis un moment, l’ont déjà vu manger avec des personnes que la loi désigne comme pécheurs. Ces pharisiens ont remarqué également que les disciples de Jésus ne jeûnent pas. Ils les ont vus, récemment, un jour de sabbat, arracher des épis de blé et les manger, ce qui est formellement interdit par la loi.  
Le regard que les pharisiens porte sur Jésus est donc non seulement influencés par ce qu’ils considèrent comme important, c’est-à-dire la loi religieuse, mais aussi par le jugement qu’ils ont déjà porté sur Jésus en fonction de ces différentes situations observées. 
Ces pharisiens sont également influencés par les sentiments qui les habitent. Le récit ne nous dit pas quels sentiments animent ces hommes mais il nous rend attentifs, en revanche, à ce que ces sentiments suscitent. 

Les pharisiens épient Jésus, ils cherchent à l’accuser, ils ne lui veulent donc pas du bien. Le regard qu’ils portent sur Jésus est négatif. Il est influencé par ce qu’ils ressentent face à cet homme qui leur fait quand même beaucoup d’ombre.  
Imaginez, ces pharisiens ont l’habitude d’être considérés, admirés, respectés, écoutés et voilà que ce Jésus provoque les mêmes réactions au sein de la foule.  
C’est à travers ces différents éclairages que les pharisiens regardent la scène qui se déroule sous leurs yeux en ce jour de sabbat, dans la synagogue.  
Ces hommes, pourtant, auraient pu avoir un autre regard. Ils auraient pu voir ce que Jésus remarque aussitôt. 
Dans la synagogue, il n’y a pas que des pharisiens et Jésus. Il y a aussi d’autres personnes et il y a surtout un homme qui souffre. Cet homme est handicapé. Il ne peut plus se servir d’une de ses mains. Elle ne réagit plus, elle est comme sèche, nous dit le texte.  
Le regard de Jésus est alors attiré vers cet homme. C’est lui qu’il voit en priorité. Et c’est sur lui qu’il va attirer l’attention de tous. 
Jésus, en effet, va vers cet homme et il lui demande de se lever et de venir au milieu de la foule. Jésus veut permettre ainsi à chacun de voir cet homme, de prendre conscience de sa souffrance, de son isolement.  
Pour reprendre l’image des doubles illustrations, nous pouvons dire que Jésus rend attentifs les pharisiens et la foule en général à une autre façon de voir la réalité. 
Jésus, en quelque sorte, dit aux pharisiens : vous me remarquez moi pour essayer de m’accuser et si vous changiez de regard, si vous le tourniez vers celui qui a besoin d’attention, vers celui qui est isolé, vers celui qui souffre. 
Jésus invite donc les pharisiens à regarder autour d’eux en se laissant éclairer par l’amour. Il les encourage à changer de vision et il souligne cela en mettant au milieu d’eux cet homme qui souffre.  
Jésus cherche à faire comprendre aux pharisiens que si la loi est importante, il ne faut jamais oublier ce qui en constitue la base, ce qui est au cœur de cette loi. 
Et ce qui est au cœur de cette loi, c’est l’amour. L’amour de Dieu et l’amour pour Dieu ; l’amour également des autres mais aussi de soi-même. 
Nous voyons, en méditant ce texte biblique, qu’il y a pour nous aujourd’hui un message qui nous invite à élargir le faisceau de notre projecteur lorsque nous considérons notre identité. Au lieu de le braquer sur quelques considérations, nous pouvons éclairer toute notre vie et celles des autres avec la puissante lumière de l’Amour.  
Toute vie est importante parce qu’elle est aimée de Dieu. Cet amour n’est pas motivé par les critères que nous avons évoqués au début de notre méditation. Cet amour est inconditionnel, il est offert à chacune et chacun, sans exception, quelles que soient son apparence, sa position hiérarchique, son âge, sa vie professionnelle ou familiale, ses réussites ou ses échecs, ses convictions ou ses origines.  

C’est dans cette lumière que le Christ nous invite à nous rencontrer les uns les autres et à prendre soin des uns et des autres en sachant qu’Il ne nous laisse pas seuls. Il nous rejoint au cœur de notre vie pour lui donner plus d’intensité, de force, d’espérance et de joie.  
En tout temps, en tout lieu, nous pouvons lui demander son aide, son aide dans nos souffrances mais aussi son aide pour nous permettre de nous laisser toujours et encore guider par l’amour. 
Cette prière, les frères de Taizé l’expriment tout particulièrement à travers ce chant bien connu qui dit : 
Jésus, le Christ, Lumière intérieure, ne laisse pas mes ténèbres me parler. Jésus, le Christ, lumière intérieure, donne-moi d’accueillir ton amour.  
AMEN 

Pensée du jour

Il suffit d’une pincée de croyants (Psaume 105,1-15)

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