Les ministres de la paroisse partagent leur prédication

Les ministres déposent régulièrement leurs prédications sur le site de la paroisse afin de permettre aux personnes qui le désirent de retrouver l’essentiel de la prédication du dimanche.

La prédication depuis le lutrin ou la chaire ne se réduit pas à la lecture d’un texte. En effet, le prédicateur prend toujours des libertés face à son texte écrit, parce qu’il a devant lui une assemblée avec laquelle il entre en interaction au fur et à mesure que se vit la prédication.

Nous vous souhaitons une agréable lecture et n'hésitez pas à prendre contact avec la prédicatrice ou le prédicateur du jour.

Lectures : Daniel 7,13-14 ; Matthieu 24,36-44 ; Romains 13,11-14a

Olivier Rosselet

1er dimanche de l’Avent

J’aime ce temps de l’Avent. On entre dans une nouvelle année avec Jésus. Ce soir des centaines de feu dans le canton annonceront la venue prochaine de notre Sauveur. Des chœurs, des chorales se préparent à chanter Noël. Nos villages dressent des sapins sur les places, dans nos églises. On prend rendez-vous avec nos proches, nos amis, nos familles pour se revoir, être ensemble. Alors bien sûr, l’agenda est un peu chargé, mais on entre dans un temps à part, qui change notre quotidien.

C’est bien ce que le Christ est venu faire en choisissant de naître au milieu de nous : changer notre quotidien, le remplir de sa lumière, nous offrir des rencontres, nous remettre debout à l’image de ces sapins qui se dressent dans nos villages.

Puissance prématurée en ce temps de l’Avent ?

Les textes proposés ce matin parlent tous de la venue du Christ. Mais d’une venue dans la gloire, dans la puissance. Lorsqu’il viendra, il n’y aura pas de doute, ça se saura. Pas besoin de chercher une humble crèche dans une bourgade perdue, dans un pays que personne ne connaît.

Le livre de Daniel nous décrit un homme arrivant dans les nuages. Cet homme reçoit gloire et puissance. Son règne n’a pas de fin.

Dans Matthieu, l’arrivée du Christ est synonyme d’un monde nouveau, d’une nouvelle Création. 

L’apôtre Paul, lui, nous dit que le jour va bientôt se lever. 

Ces puissantes manifestations de la venue de Jésus ne doivent pas nous inquiéter, nous faire peur, ou nous figer telles des statues de sel. Toutes ces manifestations sont des promesses pour demain, pour un temps où le mal, la misère, la nuit, la guerre n’existeront plus. Le temps de l’Avent est là pour accueillir cette promesse, nous y préparer et témoigner de la lumière.

Veiller

« Je continue de regarder », dit le prophète Daniel. Au milieu de la nuit, Daniel regarde. Daniel pourrait dormir, mais il regarde, et il voit, nous dit le texte. Il voit un homme qui vient dans les nuages. Cinq siècles avant la venue de Jésus, Daniel prophétise la naissance de Jésus et son règne. 

Comme pour Daniel, Dieu nous parle aussi, Dieu se révèle. Il a des choses à nous transmettre, gardons nos sens en éveil. Durant ce temps de l’Avent, cette période de l’année où les nuits sont les plus longues, Dieu m’encourage à regarder. C’est dans la nuit que Jésus a choisi de venir au monde. C’est dans la nuit que Daniel regarde, scrute, veille et voit ! Dieu nous encourage à garder les yeux ouverts, malgré la nuit, malgré les difficultés, malgré la fatigue, malgré l’impatience, malgré nos doutes. « Veillez ! », Nous dit Dieu, « je viens bientôt ».

Au milieu de la nuit, les rois mages ont gardé les yeux ouverts et ont vu une nouvelle étoile. « Les gens de tous les peuples, de tous les pays,  et parlant toutes les langues se mettent à le servir » raconte Daniel. Les rois mages en sont un bel accomplissement. Et c’est toujours une promesse pour aujourd’hui. La venue du Christ concerne toute la planète, pas que les humains, mais la Création tout entière !

Tout doit disparaître !

Nous lisons dans Matthieu que l’ancienne terre doit passer, comme au temps de Noé, pour faire place à une nouvelle terre. La venue de Jésus est semblable à une nouvelle Création. On efface tout et on recommence. A l’époque de Noé, Dieu avait tout détruit. 

« Tout doit disparaître », c’était vendredi, le « Black Friday ». Jour de soldes, jour de vente à outrance, jour de tous les excès. Achetez ! Tout doit disparaître, pour faire place aux nouvelles tendances.

Mais après le déluge, Dieu a promis à Noé et à toute la création que plus jamais il n’anéantirait la Terre. Pour se rappeler sa promesse, Dieu a inscrit dans le ciel un grand arc, horizontal, un arc qui tire vers le ciel, un arc inoffensif. Déjà à l’époque, Dieu a transformé les armes et les a mises en pleine lumière. Il n’était plus question de tout faire disparaître. Beaucoup plus tard, Esaïe évoquait un temps où Dieu transformerait les épées en pioches, les lances en faucilles. Dieu est un Dieu de paix. 

A Noël, ce n’est pas une inondation, ne n’est pas des explosions qui permettent l’émergence d’une nouvelle terre, c’est l’incarnation d’un petit d’homme. La venue de Dieu au milieu de nous, fait naître une nouvelle Terre. Plus de déluge, Dieu l’a promis.

Semer et récolter

Temps de l'Avent, temps à part. Temps pour échanger nos épées contre des pioches, nos lances contre des faucilles. Témoigner du Christ a des effets concrets. L'énergie pour se battre, faire la guerre, tuer; toute cette énergie le Christ la transfigure pour nourrir la planète, partager, récolter, promouvoir la vie. Ce temps de l'Avent dans lequel nous entrons, est comme un miroir qui nous montre ce que sera le paradis. 

Des « pioches » et des « faucilles ». Les outils parlent d'eux-mêmes. La pioche permet de préparer le terrain, de retirer les pierres et tout ce qui empêche les graines de germer, de grandir, et de donner du fruit. L’Evangile de Matthieu parle d’ignorance, d’insouciance, d’indifférence de la population. Aujourd’hui aussi, on ne sait plus qui est Dieu, qui est Jésus, ce que représente Noël. Dieu nous appelle à être jardinier de cette terre ingrate, à veiller, à rester debout et à préparer toutes les personnes que nous côtoyons à accueillir la bonne nouvelle.

La faucille, elle, est un outil de récolte. Malgré la terre ingrate, bien des fruits sont là, les épis sont mûrs, le blé est doré. Il n'attend plus que d'être coupé et être mélangé à d'autres grains pour nourrir le monde. Ces épis bien lourds, c'est les jeunes de nos Eglise impatients de pouvoir s'engager à la suite du Christ. C'est des paroissiens, des amis, des voisins qui ont soif de partager leur foi, de la vivre. Que le temps des semailles ne nous fasse pas oublier le temps de la récolte.

Nous ne devons pas, comme Noé, construire notre arche, inaccessible, dans lequel les élus seront sauvés, et où tous les autres restés à l'extérieur périront. Aujourd'hui, ce n'est pas une arche que nous devons dresser devant nous, c'est une petite crèche, autour de laquelle les gens du monde entier sont appelés à se rassembler. Le Dieu tout puissant, un éclair dans la main droite à l'image de Jupiter, se fait petit d'homme, fragile. La puissance, le jugement, la colère, font place au pardon, à l'amour, à la tendresse.

C'est petit, une crèche, discret. On risque de passer à côté sans s'arrêter. C'est pourquoi Dieu me demande de veiller. De garder les yeux ouverts, le cœur ouvert. Le Seigneur vient, et il est déjà là.

Amen

Lectures : 2 Samuel 5,1-4 ; Evangile selon Luc 23,39-43 ; Colossiens 1,17-20

Transition

Ces trois textes nous présentent un nouveau règne, que ce soit celui du roi David ou celui de Jésus-Christ. Ces trois textes nous parlent d’un passage, d’un avant et d’un après.

En ce dimanche, nous vivons également une transition. Avec Eglise 29, nous allons découvrir ce que pourrait être notre future paroisse, nous allons décider si nous allons de l’avant ou si nous préférons attendre. Les trois textes de ce matin peuvent nous éclairer, nous offrir des pistes.

1 Onction de David

J’ai redécouvert le récit de David qui devient roi, suite à Saül. David, à ses débuts, est plus proche d’un chef de guerre que d’un grand roi. Sept ans auparavant, suite à la mort de Saül, David avait été consacré roi par la tribu de Juda. Cela se passait déjà à Hébron. Aujourd’hui, sur ce même Mont Hébron, où sont enterrés Abraham et Sara, Isaac et Rébecca, Jacob et Léa, ainsi que Joseph, David est consacré roi de tout Israël. Il reçoit l’onction de la part de Dieu, et rapidement Jérusalem va devenir la capitale d’Israël.

« Hébron » rappelle le passé d’Israël, ses racines, les patriarches et les matriarches y sont enterrés. C’est le pays que Dieu a donné à Abraham. Ce n’est pas pour rien que David est consacré roi dans cette ville à 30 km au Sud de Jérusalem, la plus haute ville de Palestine, à environ 1000 mètres d’altitude. Le nouveau roi ne part pas de rien. Il est précédé, il construit sur du solide.

Eglise 29 s’enracine également dans le passé. Notre Eglise n’est pas née de la dernière pluie. Elle a une histoire. Nous en faisons partie, nos parents, nos grands-parents aussi. Eglise 29 ne fait pas table rase du passé, elle l’accueille et se construit avec.

Revenons à David. Son royaume s’agrandit. Après avoir régné sur Juda pendant 7 ans, David règne sur tout Israël. Notre paroisse va également voir sa surface augmenter. Mais nous avons notre mot à dire, comme au temps de David. Les habitants viennent chercher David, les Israélites viennent à lui et lui disent : - Nous sommes de la même famille que toi. David est pourtant de la tribu de Juda, mais son Royaume s’étendra sur les douze tribus d’Israël, avec leur accord. Les habitants des autres tribus se rappelle que Dieu avait dit de David : - C’est toi qui seras le berger d’Israël, mon peuple.

Avec Eglise 29, le territoire de la paroisse sera plus grand, plus étendu, et j’aime cette phrase pleine de confiance de la part des Israélites : - Nous sommes de la même famille. Avec les nouveaux villages de la paroisse, nous apprendrons à mieux nous connaître, comme nous avons déjà commencé à la faire lors des cultes Nomades par exemple. Nous rencontrerons de nouvelles personnes, nous formerons un seul peuple. Et puis, comme pour David, je veux croire que Dieu a préparé toute chose. Sa parole nous accompagne

Le règne de David, comme celui de Saül précédemment, durera 
40 ans. 40, dans la Bible c’est le signe d’un passage, d’une transition, d’un changement important. Le déluge à l’époque de Noé dure 40 jours, l’exode des Hébreux en vue de la terre promise dure 40 ans, la tentation de Jésus dans le désert dure 40 jours. 40 jours également séparent la résurrection du Christ de l’Ascension. Le chiffre 40 ouvre vers des lendemains de promesses.

Eglise 29 nous ouvre un avenir différent. Il n’y pas que les frontières qui  vont bouger, il faudra adapter nos cultes, sans baisser leur fréquence, imaginer de nouveaux projets pour toucher la population active, faire place à la jeunesse qui n’est plus liée comme nous le sommes à un territoire. J’espère qu’il ne nous faudra pas 40 ans pour y arriver, mais cela demandera de la patience, de la confiance.

Enfin, David, pour devenir roi, a été oint, il a reçu de l’huile sur la tête pour être consacré, il a été mis à part pour Dieu.

Pour le futur de notre Eglise, nous aussi aurons besoin de recevoir la bénédiction de Dieu. De nous rappeler, que notre Eglise, avant d’être une institution, des frontières sur un territoire, ou un ensemble de bâtiments, l’Eglise est d’abord le fruit d’une bénédiction. Dieu s’est approché de nous il y 2000 ans, et depuis, il fait route avec nous. Il nous bénit, jour après jour. Comme David, l’Eglise a reçu une onction de la part de Dieu. Une manière de dire : - je t’aime, j’ai confiance en toi. Cette onction, chacun peut la demander aussi pour soi-même, et cela plusieurs fois dans une vie.

2 Tu seras avec moi 

A propos d’onction, peut-être le savez-vous, mais le mot « Christ » veut dire « oint » en grec, et le mot « messie » signifie « oint » en hébreux. Jésus, suite à sa mort sur la croix et sa résurrection, est devenu le Christ, le oint de Dieu, le fils de David annoncé par les prophètes.

Lorsque Jésus était sur la croix, un des brigands à ses côtés lui avait proposé de descendre de sa croix pour fuir cette mort qui l’attendait. Mais Jésus a choisi de mourir, pour pourvoir renaître, pour devenir ce Christ qui nous accompagne jour après-jour. Pourtant la tentation était là. Pourquoi mourir alors que tu peux continuer de vivre comme avant ?

La question se pose aussi pour notre Eglise : Pourquoi mourir à cette église dans laquelle nous vivons depuis 25 ans (EAV), et bien plus encore ? Est-ce bien nécessaire ? La tentation est forte de vouloir rester comme on est, de ne rien toucher, de ne rien bouger. Mais le Christ, par sa mort et sa résurrection, nous encourage à avoir confiance et nous montre le chemin. 

A l’image du bon larron, faisons confiance à Jésus. – Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton règne ! Comme ce brigand, disons à Jésus : - je veux en être, je veux participer à cette vie nouvelle qui est devant moi, à cette Eglise nouvelle qui se construit. Ayons confiance, foi en l’avenir. Jésus accueille notre requête. Comme il a accueilli celle du bon larron en lui répondant : - Aujourd’hui, tu seras avec moi au paradis, Jésus me dit : - Tu en es déjà aujourd’hui. Oui, il est parfois nécessaire de mourir, pour renaître, pour ressusciter avec le Christ, pour se laisser conduire par lui sur des chemins nouveaux.

3 Jésus est La tête de l’Eglise

Je termine en remettant l’Eglise au milieu du village, ou plutôt le Christ au milieu de l’Eglise. On connaît la lettre de Paul aux Corinthiens qui décrit l’Eglise comme le corps du Christ. On peut être l’œil, le pied, la main. Chaque membre, chaque partie du corps est nécessaire.

Dans sa lettre aux Colossiens, Paul ajoute un élément à cette belle image du corps : la tête. Et cette tête, c’est Jésus lui-même. La tête, ce n’est ni le Conseil synodal, le synode, le Conseil paroissial, ou encore les ministres. La tête de l’Eglise c’est le Christ. C’est lui qui conduit, qui coordonne, qui était là avant, qui est là maintenant et qui sera encore là demain. Paul le dit : tout ce qui existe ne tient que par lui ! Eglise 29 n’avance pas à l’aveugle, elle est accompagnée, elle est portée.

Lecture : Lettre aux Ephésiens 1,9-10

« Dans sa bienveillance, Dieu nous a fait connaître son projet de salut, celui qu’il avait décidé par avance de réaliser par le Christ. Ce projet, que Dieu conduira à son accomplissement à la fin des temps, consiste à rassembler tout ce qui est dans les cieux et sur la tête sous une seule tête, le Christ » (Éphésiens 1,9-10)

Et si c’était vrai. Imaginez-le, une seule seconde : et si c’était vrai. Et si on laissait tomber notre scepticisme d’usage, notre méfiance quotidienne – tout à fait justifiée par ailleurs, on s’entend. Et si on laissait à cette vérité prendre toute sa place. Et si c’était vrai. 

Vrai non pas juste maintenant, dans ce moment fugace où nous nous sommes rassemblés et où je vous parle. Vrai, non pas le temps que nous prêtons attention, à ces phrases, à cette idée, le temps que nous nous en rappelons – éventuellement. Oui, et si c’était vrai au-delà de nous. Au-delà de ce que nous pouvons ressentir, et expérimenter, de ce qu’on nous a raconté, de ce qu’on a entendu, au-delà de ce que nous sommes prêts ou non à croire, au-delà de notre capacité à accueillir et à intégrer, à oublier ou à ignorer.

Et si c’était vrai que tout, vraiment tout, est placé dans une clarté éternelle, une lumière qui nous montre les choses telles qu’elles sont en toute vérité, une lumière qui nous montre ce qui va rester et qui a toujours été, par-delà les errances et les tribulations de nos vies, par-delà la mort elle-même.

Une clarté éternelle qui n’est pas un jugement froid, lucide, équilibré. Mais un amour plein et entier, inconditionnel. Qui a touché des visages, guérit des blessures, qui a ri, qui pleuré. Non pas une lumière glaciale, qui gèle tout dans une éternité sans mouvement, statique, mais une vibration chaleureuse qui fait circuler, qui partage et se partage elle-même.

Un amour qui ne retient rien, mais qui donne tout. Un amour qui abolit toute prétention de souveraineté, qui laisse le mal derrière lui, un amour qui fait vivre, un amour juste. Un amour qui ne veut être solitaire, mais qui aime jusqu’aux confins de l’univers – de la plus petite bactérie aux nébuleuses, du plus sombre au plus clair, de l’être le plus honorable à l’être le plus misérable. 

Et si c’était vrai que nous avions notre place, nous aussi, dans cette clarté, dans le partage de cet amour. Que nous n’en sommes pas uniquement les spectateurs, mais que nous sommes nous aussi pris dedans – que nous avons toujours-déjà été pris dedans. Une clarté éternelle où nous sommes là, nous aussi. Où nous avons notre place, entièrement, telle que nous sommes, corps-âme-esprit, avec notre histoire et nos émotions. Où nous ne sommes pas seuls. Où nous sommes avec tout ce qui a respiré, existé, dans ce monde – ce qui a été vu et entendu, mais aussi ce qui a été ignoré ou oublié. Mais aussi tout ce qui sera que nous ne soupçonnons pas encore. 

Et si c’était vrai – que cette éternité transparaît dans notre temps, que cette attraction de toute chose par l’amour et la lumière n’est pas un secret bien gardé, mais qu’elle vient encore et encore à nous. Qu’elle ne se cache pas, mais qu’elle se révèle. 

Alors je peux commencer à voir toute chose dans cette clarté.

Dans ce qui est obscur et confus, il y a une lumière qui cherche mon regard, une voix éternelle qui appelle mon écoute. Face à ce qui me menace et me fait peur : je peux me tenir, peut-être avec crainte et tremblement, mais sans aller à ma perte. Parce que je suis, j’ai été, je serai dans cet amour qui m’a voulu.

Je peux regarder en arrière et découvrir les traces de cet amour – et je peux regarder en avant : là où tout se rassemble, là où nous nous retrouverons tous et toutes, au-delà de nos souffrances, de nos enfermements, de nos oublis et de nos amertumes.

Je peux regarder et voir : là – tu es là, toi. Lumineux, entier.

Amen

Lectures : Psaumes 104 ; Evangile selon Marc 1,12-15

PERDU

- Alors… Quelle heure est-il , à votre avis ? … Sans nos montres et nos portables, on se sent un peu tout nu, exposé, un peu perdu. On perd ses repères. Il faut se faire à nouveau confiance. 

Le temps n’est plus compté, minute après minute, heure après heure. Nous ne recevons plus en temps réel des nouvelles de ceux qu’on aime. Il faut attendre, avoir de la patience. Accepter de ne pas tout savoir sur le moment. Nous aurons des nouvelles lorsque nous recevront une lettre, lorsque nous nous reverrons, ou lorsque des proches nous parlerons des personnes qui nous sont chères.

Plus de réseaux sociaux, plus de messageries, plus d’applis. Plus moyen de faire une photo pour garder un souvenir, de chercher une info sur Google, ou de se repérer dans l’espace avec mon GPS.
Où suis-je ! 

Je suis dans les mains de Dieu !

Oui, durant ce week-end, vous les jeunes, sans votre portable, j’imagine que vous étiez parfois désemparés, et pourtant, à la fin de ces trois jours, vous disiez : “Tout le week-end était un moment spirituel.” Une manière de dire, que vous étiez dans les mains de Dieu.

TENTÉ

Lorsque Jésus a été entrainé dans le désert par le St-Esprit, lui aussi a dû abandonner tous ses repères. Une manière de se retrouver dans les mains de Dieu, sans autres possibilité que de s’en remettre à lui totalement. Il s’est retrouvé comme vous avec les bêtes sauvages autour du chalet, des vaches peut-être aussi … Jésus se retrouve dans la situation d’Adam et Eve dans le jardin d’Eden, entourés d’animaux. Le diable, comme avec Adam et Eve, va essayer de faire tomber Jésus, mais cette fois, le diable tombe sur plus fort que lui. Jésus résiste. 

Comment avez-vous fait ? Vous les jeunes, pour résister à la tentation d’aller rechercher vos portables dans le carton ? Le fait d’être plusieurs, ça aide, bien sûr. Seul cela aurait été plus difficile.  Mais bravo. Je ne sais pas si vous avez prié ? la Bible ne dit pas non plus si Jésus a prié. On peut l’imaginer. On sait par contre que l’initiative venait de l’Esprit Saint. Qui sait, pour vous les jeunes, si ce n’est pas aussi l’Esprit Saint qui vous a mis en route pour organiser ce week-end « no time, no phone ». Il ne vous pas laissé tout seul. La Bible dit que des anges servaient Jésus. Oui, Dieu prend soin de ses enfants, il nous accompagne, nous porte, nous envoie ses anges.

EMERVEILLÉ

Pendant 3 jours, - le temps pour ressusciter - vous les jeunes, avez renoué avec la Création, vous avez retrouvé les temps de l’émerveillement, de l’adoration. Comme au commencement du monde. Comme Jésus avec les bêtes sauvage. C’est pourquoi nous avons lu quelques versets du psaume 104. Ce psaume qui magnifie la Création, qui dit combien elle est belle, combien Dieu l’aime et en prend soin. Durant ces trois jours, vous avez profité de la nature, du vent qui souffle, des chants d’oiseau, des couleurs de l’automne, vous avez dansé parmi les feuilles mortes, vous avez vu le soleil se coucher à l’horizon. 

ACCOMPLI

Sans montre, sans repère du temps qui passe si ce n’est le jour et la nuit, la position du soleil et des étoiles, vous les jeunes, avez réappris à vivre le moment présent, à l’apprécier, sans vous dire, dans 30 minutes, c’est l’heure du repas, dans 1 heure, il y telle ou telle activité, j’ai juste le temps de faire encore ça. Non, vous avez pu vous déconnecter du temps qui passe pour vous connecter au présent. C’est tellement rare de nos jours. Vous avez pu vivre un temps plein, un temps de qualité, un temps avec Dieu.

Jésus, après avoir été tenté dans le désert affirme : - Le temps est accompli, et le Royaume de Dieu est tout près de vous. Ce temps du Royaume, ce moment d’émerveillement, ne se vit pas seulement dans un chalet, sans téléphone, ou dans une parenthèse à part du monde. Il se vit ici, maintenant. Dans ce culte, dans une journée ordinaire. À tout moment, le Royaume de Dieu est proche.

Quand vous remettrez vos montres à la sortie, peut-être qu’elles ne marqueront plus seulement des heures, mais des moments de grâce. Des instants où l’on respire, où l’on bénit, où l’on s’émerveille. Le temps est accompli, le Royaume de Dieu est tout près de nous.

Lecture : Nombres 27,1-7 ; Jean 17,9.11.13.20 ; Jacques 5,13-16

Proposition de la paroisse

Jana, Adjovi et moi-même avons chacune, chacun une expérience de prières après les cultes. Que ce soit lors d’une formation, d’une visite d’Eglise, ou d’expérience dans une ancienne paroisse. La prière à la fin des cultes permet aux personnes qui le désirent, de recevoir la prière. Pas besoin que ce soit long, ou que ce soit des sujet lourds ou difficiles. Simplement, n’importe qui à la sortie du culte peut s’approcher d’une personne du groupe de « prière après le culte » ou du ministre, et demander qu’on prie pour lui, pour elle. Deux personnes l’accompagneront dans un endroit discret, sur la galerie, à la sacristie ou la salle de paroisse selon les villages afin de prier pour elle. La personne pourra exprimer en quelques mots si elle le désire la raison de sa demande. Puis les deux personnes qui l’accompagnent prieront pour elle. Cela dure en général 5 à 10 minutes maximum. Bien sûr, tout ce qui se dira durant ce moment restera confidentiel et ne sortira pas des trois personnes rassemblées.

Jana, nouvellement arrivée dans notre paroisse, a proposé d’offrir cette opportunité à notre paroisse. Tout de suite, l’idée a plu à notre Conseil et ce matin, ceux qui le désirent, pourront demander la prière à l’issue du culte. Le projet est d’offrir la prière personnelle un dimanche sur deux, à partir d’aujourd’hui, sauf pendant les vacances scolaires.

Prière et onction

Vous l’avez entendu, la lettre de Jacques nous encourage à prier les uns pour les autres. Il est même parlé d’onction d’huile. Certains diront, pas de ça chez nous, ça fait catholique ou évangélique ! Non, c’est simplement biblique. Les premières communautés chrétiennes pratiquaient régulièrement l’onction d’huile. Lorsqu’on priait pour la guérison d’une personne malade, on versait quelques gouttes d’huile sur elle. Dans la paume de ses mains, sur son front ou sur l’endroit qui avait besoin de guérison.

Je vous rassure, pour ceux et celle que ça gênerait, pour le moment nous ne la pratiqueront pas. Mais si le demande devait devenir naturelle, rien n’empêche que nous puissions la proposer à l’avenir.

Je me rappelle, que dans ma précédente paroisse, il arrivait que nous restions en cercle dans le chœur après la sainte-cène. Certains paroissiens demandaient alors la prière en s’avançant d’un pas et deux personnes venaient prier pour elle avec des paroles simples comme : Dieu d’amour, s’il te plaît, réponds à la demande de (prénom), et bénis-le (la), Toi le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Amen. Le pasteur était également présent si l’onction d’huile était demandée, et cela se vivait tout naturellement.

La lettre de Jaques nous dit que cette prière sauve le malade, offre le pardon, la guérison, et remet debout. Je crois aussi qu’une prière reçue au sein de la communauté cimente celle-ci, resserre les liens, renouvelle la confiance, fortifie chacune et chacun. Pas besoin de faire partie du groupe de prière ou de demander la prière pour participer. Il est aussi possible de prier discrètement pour la personne qui s’avance, en silence, en restant où on est.

Il n’est pas question non plus de trembler, de pleurer, de s’évanouir. La prière n’a pas besoin de manifestation visibles pour agir fortement. Cependant, l’Esprit est libre d’agir comme il le désire, il est souverain.

Sortir des clous

En cherchant des récits bibliques avec des exemples de prières personnelles pour des gens, j’ai repensé à un récit proposé par « pain de ce jour » il y a quelques semaines. Il s’agit des filles de Selofad. Elles sont cinq : Mala, Noa, Hogla, Milka et Tirsa. Leur père est décédé alors que le peuple hébreu traversait le désert en direction de la terre promise. Ces 5 femmes s’approchent de Moïse et des notables et demandent de pouvoir hériter de leur père, bien que la loi ne le leur permette pas. Moïse accueille leur demande et la présente à Dieu, qui va leur accorder une terre.

J’aime cette histoire. Elle nous fait sortir des clous. Il n’est pas question de vie ou de mort, de maladie, ou encore de péchés. Simplement un texte de loi qui n’est pas correct, qui prend position, qui favorise l’un au dépend de l’autre, l’autre étant les femmes. Moïse aurait pu se reposer sur ce texte, et repousser ces 5 femmes. Mais non. Il prend au sérieux leur demande et la présente à Dieu.

Toute demande peut être présentée à Dieu, lui seul est juge. Lui seul décide, Il est souverain. N’ayons pas peur de demander à Dieu de nous aider, de nous accompagner, de nous libérer, de nous remettre debout. Bien sûr, on peut prier Dieu soi-même, dans sa chambre. On est Vaudois, on ne veut pas déranger, on ne veut pas se montrer, se mettre en avant. Les gens pourraient penser : Qui est-il, qui est-elle pour oser demander la prière ?

Non ! Avant d’être Vaudois, nous sommes des frères et des sœurs. Dieu nous appelle à nous soutenir les uns les autres, à prier les uns pour les autres. Demander la prière, ce n’est pas se faire grand et important, c’est se faire petit et s’attendre à Dieu en demandant l’aide de ses frères et sœurs en Christ. Cependant, ça demande du courage, oui, car ce n’est pas dans notre ADN de Vaudois.

Mala, Noa, Hogla, Milka et Tirsa ont également dû prendre leur courage à deux mains pour demander de modifier cette loi injuste. Elles auraient pu dire: à quoi bon! Et bien non, elles ont pris sur elles, et ont présenté leur demande ouvertement, devant tout le peuple, à Moïse, au prêtre et aux responsables. Que des hommes ! Et le Seigneur les a honorées.

Ce récit est un exemple parmi beaucoup d’autres dans l’Ancien Testament. Beaucoup de patriarches, de prophètes, d’homme de femme ont prié pour des personnes qui en avaient besoin. Par eux, Dieu a redonné la santé, voir même la vie. Chaque fois la prière ouvrait vers un avenir.

Le Christ intercède pour nous

Les Evangiles aussi sont truffés d’exemples où Jésus prie pour une personne pour la guérir, la libérer. Mais quasi systématiquement, Jésus leur demande ce qu’ils attendent : Que désires-tu, que veux-tu que je fasse pour toi, de quoi as-tu besoin ? Oui, Dieu attend des demandes précises de notre part. 

Dans le texte entendu tout à l’heure, peu avant d’être arrêté par les Romain et d’être crucifié, Jésus a prié son Père en faveur de ses disciples. Garde-les par la force de ton nom[…] a dit Jésus. Qu’ils aient ma joie, une joie totale !

Avant de quitter ses disciples, Jésus les a remis dans la main du Père, en toute confiance.

Cela me rappelle, des récits de mon enfance, dans mon village, plutôt dans des familles darbystes, ou le grand-papa rassemblaient ses enfants et ses petits enfants autour du lit où il était couché, pour les bénir, avant de mourir. La bénédiction est aussi une prière. Une belle prière qui fait du bien, qui nourrit, qui transforme., qui renouvelle. N’hésitons pas à nous bénir les uns les autres. Là aussi, les Vaudois que nous sommes avons un peu de peine, ça fait bigot, ça fait mômier, et pourtant quel bien ça fait!

Aujourd’hui, Jésus continue de prier pour chacun de nous. Il l’a promis quand il a quitté ses disciples. « Je ne prie pas seulement pour mes disciples, a-t-il dit, Je prie aussi pour ceux qui croiront en moi ». Même si je ne demande pas la prière à l’issue du culte, cela n’empêchera pas que quelqu’un continue inlassablement de prier pour moi: Jésus. L’apôtre Paul le dit et d’autres avec lui : Jésus, assis à la droite du Père, intercède pour nous. 

Et avec Jésus, nous sommes nombreux à intercéder jour après jour, les uns pour les autres. Nous nous portons et demandons à Dieu d’intervenir envers tel.le et tel.le, d’aider, de soulager, de consoler, de guérir. Nous sommes une belle communauté, soutenante et soutenue par la prière mutuelle. 

Lectures : Daniel (version grecque) 3,46-51 ; 1 Pierre 2,18-21 ; Luc 10,17-10

Chanter

Par le chant, le corps entier devient un instrument de musique. On ne peut en effet réduire le chant à la bouche, ou la gorge. Ce serait comme de dire que le son du violon viendrait uniquement du son des cordes frottées par l’archet, ou que le son du piano viendrait de la corde frappée par le marteau. Non, c’est bien plus complexe. Dans les deux cas – et en fait pour n’importe quel instrument de musique – le son n’est rien sans le corps qui fait résonner la vibration, qui lui donne son volume, sa couleur, son caractère.

Par le chant tout mon corps devient un instrument: pas uniquement ma voix. De la plante de mes pieds, jusqu’au sommet de mon crâne, tout mon corps contribue au chant, générant une vibration dans laquelle le corps se met lui-même à baigner.

Chanter c’est ce double mouvement: en chantant, je fais vibrer l’instrument que je suis, c’est avoir l’initiative. Mais continuer à chanter c’est aussi se mettre à l’écoute de ce qui résonne en retour ou de ce qui résonne en même temps que moi. C’est la salle, le lieu dans lequel je me trouve, qui se met à vibrer avec moi lorsque j’élève la voix. C’est d’autres instruments de musique, c’est la voix des autres personnes qui chantent avec moi, qui se joignent à ma voix ou auxquelles moi-même je me suis jointe.

Lorsque je chante, quelque chose vient bien de moi. Mais je ne peux pas chanter sans écouter – et si je ne le fais pas intentionnellement, c’est bien l’ensemble de mon corps et de mon esprit, qui écoute cette vibration révélée et amplifiée.

Avec le chant c’est aussi toute mon âme, ma vie intérieure, qui se met à vibrer : par les forces des émotions mobilisées pour tel passage vigoureux, héroïque, ou plus mélancolique, empreint de tristesse – c’est aussi l’émotion qui s’anime en nous, parfois par surprise. Car la vibration reconnecte avec telle situation passée, telle image marquante. C’est aussi la connexion anticipée, avec des choses que je ne peux même pas encore soupçonner: c’est le rêve et l’espérance matérialisée dans le monde, et qui contribue à le faire accoucher de sa propre existence dans la gloire. Oui, le chant révèle cette puissance.

Alors il n’est pas étonnant que le chant prenne une place si importante dans la vie humaine – et singulièrement dans la foi chrétienne. L’histoire du christianisme (et avant lui du judaïsme) voit poindre en tout lieu et constamment le chant. Les textes sacrés doivent sans doute être d’abord chantés avant d’être lus! 

Résister par le chant

Et si je prends le temps de vous parler autant de chant aujourd'hui, c’est aussi parce que dans le chant, il y a quelque chose de notre vie, tel qu’elle est préservée et gardée en Dieu – notre vie éternelle – qui jaillit dans le monde, qui en un certain sens nous devient sensible: la vie éternelle ce n’est plus uniquement une vue de l’esprit, une perspective abstraite – c’est quelque chose qui me prend par les tripes, qui traverse tout ce corps tout à fait matériel et concret ! Et qui nous traverse, lorsque nous faisons corps ensemble au travers du chant: chaque voix singulière unie dans un même bain de chant, transformant même le lieu le plus insolite en une scène, un théâtre pour la vie qui dépasse toute vie.

Alors attention, je ne veux pas idéaliser à tout va le chant – je ne veux pas dire qu’à chaque fois qu’il y a du chant, le Royaume des cieux éclate sur terre. Comme toute chose, le chant peut être corrompu, aliéné – utilisé pour des fins qui nient la plénitude qu’il donne à sentir. Avec le chant on galvanise des foules, on se crée des fidèles – et on peut faire beaucoup (!) d’argent.

Mais si j’en parle aujourd’hui, c’est que le chant est à la fois un lieu de témoignage et de ressourcement. 

Au cœur du chaos, des puissances qui luttent pour leur survie, des autorités qui luttent pour avoir le pouvoir sur nous, sur nos corps et sur nos âmes, le chant offre une possibilité de résilience, à la fois douce, flexible et ferme. 

Un bref détour historique: le gospel et avec lui toute une branche de la musique contemporaine, du rock au RNB, est née dans le labeur de l’esclavage. C’est un chant qui accompagne le travail: il permet de garder le rythme (comme les chants de marin, les fameux Sea Shanty) – et donc dans un premier temps, il paraît surtout utile à celles et ceux qui exploitent les esclaves. Finalement, ce chant les rend plus efficaces – plus fructueux. Mais l’évangile de la liberté et de la dignité s’est infiltré dans ce creuset. Et ce chant devient alors une ressource de premier plan pour une survie quotidienne, qui au fur et à mesure est devenu un levier de l’émancipation afro-américaine aux États-Unis.

Je mentionne le chant gospel, mais le chant des psaumes a joué un rôle analogue lors de la Réforme – et de manière générale toute la production hymnologique protestante du 16e siècle est un lieu d’apprentissage et de défense d’une foi réformée par la Parole de Dieu. Le fameux cantique, « C’est un rempart que notre Dieu » en offre un exemple parmi d’autres.

Un dernier exemple que je veux mentionner ici, le compositeur estonien, Arvo Pärt: c’est notamment en puisant aux ressources du chant grégorien et de la tradition orthodoxe, qu’il entre en résistance face à l’État totalitaire. Celui-ci ne tolère en effet la musique que parce qu’elle peut soutenir la diffusion de l’idéologie de l’État dans le peuple. La musique de Pärt a été alors un lieu d’affirmation de liberté – notamment parce qu’elle invite à une entrée dans l’intimité, un contact avec la lumière qui luit dans l’obscurité la plus profonde. Une provocation à l’encontre d’un État qui prétend prendre en charge toutes les parcelles de l’existence.

Jubiler en toute circonstances

Les textes que nous avons entendus tout à l’heure traitent de différentes manières de cette résistance de la foi à ce qui l’opprime.

Le texte de Daniel illustre la louange de Dieu au chœur des flammes: une image miraculeuse, mais qui montre l’espérance têtue qui s’affirme malgré une violence sans bornes – des flammes de 24 m. de hauts! Une espérance qui appelle l’ensemble de la création à la joindre dans le chant et la bénédiction rendue à Dieu. 

Dans des situations d’asymétrie totale, comme celle entre le domestique et le maître, le texte de Pierre appelle à ne pas renoncer à notre vocation: refléter la présence glorieuse de Dieu dans le monde. Et dans ce cadre, non pas céder aux tentations de répondre au mal par le mal: mais demeurer dans le règne de l’amour inauguré par Christ.

En contrepoint, le texte de l’évangile selon Luc montre une foi efficace, victorieuse des forces du mal – une raison d’être en joie. Mais Jésus a ce rappel lucide: « Ne soyez pas joyeux parce que les esprits mauvais vous obéissent, mais soyez joyeux parce que Dieu a écrit votre nom dans les cieux! » (Lc 17,20) Comme une manière de conjurer le mal qui nait de la puissance que nous croyons avoir sur lui.

Ainsi, entrer dans cette résistance par le chant, c’est s’ouvrir à une forme puissante, mais douce de conversion, de transformation – la nôtre et celle du monde. 

Nous sommes nous-mêmes des instruments de la gloire de Dieu dans le monde – non pas des outils ! Des guitares, des pianos, des percussions, des voix. Et voici la promesse : que notre propre musique vienne nourrir le chant de la joie et de la vie, qui cherche à s’écouler en toute chose, en nous et – par nous – au-delà de nous. Car à la fin, tout sera jubilation.

Lectures: 2 Rois 5,14-17 (Naaman remercie Dieu) ; Luc 17,11-19 (Sur 10 lépreux un seul remercie Jésus) ; Colossiens 3,15-17 (Remerciez Dieu dans tout ce que vous faîtes!)

Dans la vie

  • une personne me tient la porte ouverte quand je rentre dans le magasin.
  • un jeune m’offre sa place assise dans le train.
  • Un vigneron me propose d’aller cueillir les dernières grappes dans sa vigne.
  • Des amis me prêtent leur chalet pour les vacances
  • Une collègue me remplace pour un service funèbre
  • Les bénévoles dans notre paroisse ne comptent ni leur temps, ni leur énergie.
  • Véronique me cuisine des bons petits plats chaque jour.
  • Un parterre de fleurs, un coucher de soleil, des montagnes enneigées, …
  • Le culte des récoltes

Que d’occasions pour dire merci!

Remercier fait partie de la vie, du quotidien. Ça rend la vie plus belle! Ça fait partie de l’éducation: pardon, s’il te plaît, merci. Merci, c’est important. Rien ne nous est dû. Dire merci change notre regard, nous remplit de reconnaissance.

  • Une paroissienne me racontait que chaque matin, en se levant, elle ouvre la fenêtre et dit « Merci ». Quelle belle manière de commencer la journée!
  • Avant chaque repas, le « Bénédicité » est une petite prière pour remercier, qui donne de la saveur à ce qu’on mange.
  • Et lorsqu’on reçoit un bouquet de fleurs de son mari, de son épouse, de ses enfants ou petits-enfants, quelle joie. C’est une manière de dire merci pour la personne que nous sommes. On se sent heureux-se, tout bien, comme dans de la ouate.

J’ai aimé les textes proposés ce matin. Les trois récits nous encouragent à dire « Merci ».

Un besoin

Naaman, ce général Syrien, un homme important, venu de loin, veut à tout prix remercier Elisée, grâce à qui il a été guéri de sa lèpre. « Je t’en prie, dit-il à Elisée, accepte le cadeau que je t’offre! ». Naaman a besoin de remercier. Il aurait pu repartir en Syrie avec ses soldats et ses troupe, sans repasser vers Elisée. Mais non. Naaman tient à dire merci, à montrer sa reconnaissance. Pourtant, vu sa position, il doit être davantage habitué à être servi et obéi, plutôt qu’à dire merci.

Mais peut-être que Naaman n’est plus le même homme.

  • C’est une petite fille à son service qui lui a révélé l’existence du prophète.
  • Elisée ne s’est même pas présenté devant le général pour lui dire que faire. Il a envoyé son serviteur.
  • Et enfin, Naaman a eu besoin de ses serviteurs pour le convaincre de se tremper dans le Jourdain.

Ce général a dû faire preuve d’humilité, d’écoute, de lâcher prise. Le regard s’en trouve changé, on apprend à dire merci.

Alors bien sûr, on pourrait se dire, Naaman ne voulait pas être redevable. En offrant tous ces cadeaux à Elisée, il payait sa dette. Mais la manière dont il s’adresse à l’homme de Dieu exprime plutôt de l’humilité: « Je t’en prie, accepte le cadeau que je t’offre! ». C’est plus fort que lui, Naaman a besoin de dire « Merci ».

L’histoire des 10 lépreux fait écho à ce premier récit. Sur dix lépreux guéris, un seul revient sur ses pas pour dire « Merci » à Jésus. Les 9 autres ne sont pas forcément des mauvaises personnes. Jésus leur a dit d’aller se montrer aux prêtres, ils vont donc se montrer aux prêtres.

Mais un lépreux, un étranger, un Samaritain, trouve plus important d’interrompre son chemin pour venir dire « Merci ». Il désobéit à Jésus. En n’allant pas se montrer aux prêtres, il court le risque que la lèpre revienne, qui sait? Mais c’est plus fort que lui, il a besoin de dire « Merci ». 

 

Qui remercier?

Et par deux fois, pour Naaman comme pour le lépreux revenu sur ses pas, le merci est adressé à Dieu. Oh, ce n’est pas spontané.

Elisée en refusant les cadeaux de Naaman réoriente le Merci du général vers Dieu lui-même. A cette époque, les dieux étaient attachés à un territoire, à une terre. Alors Naaman repart avec dans ses nasses, un peu de cette terre d’Israël, afin de pouvoir adorer chez lui ce Dieu qui l’a guéri.

Aujourd’hui, il n’est plus nécessaire d’aller dans une église pour remercier Dieu. On peut le faire chez soi, au volant de sa voiture, pendant les vacances au sommet d’une montagne ou au bord de la mer, ou encore en faisant ses emplettes au magasin.

Mais il n’empêche. La terre reste importante.

  • Je revois ces images du pape descendant d’un avion, qui se met à genoux et embrasse la terre qui l’accueille.
  • Combien de lieux de pèlerinage existent sur notre globe pour aller se recueillir, pour demander la guérison.
  • Tout près de chez nous, on aime se déplacer également sur certains lieux qui nous font du bien, nous apaisent, nous relèvent.
  • Les églises font aussi office de ces endroits qui nous sont chers. De nombreux croyant nous y ont précédés. Ils sont là mystérieusement, ils nous portent, nous accompagnent. Parfois, cela peut être un cimetière aussi.

Oui, la terre reste importante. C’est le propre de l’incarnation. Dieu s’est incarné, il s’est fait humain, un humain issu de l’humus, de la terre.

Remercier Dieu ne veut pas dire être dans la lune, au contraire. C’est avoir les pied sur terre, et reconnaître que je ne peux pas faire grand-chose sans Lui.

Le lépreux guéri revenu sur ses pas, se jette au pieds de Jésus, le front contre le sol, nous dit la Bible, et le remercie. Il rend gloire à Dieu, le nez dans la terre.

Vous êtes nombreux à rendre gloire à Dieu le nez dans la terre, chaque fois que vous êtes dans votre jardin, que vous semez, plantez, coupez, cueillez, déterrez. Vous êtes des faiseurs de vie, vous permettez à la vie d’éclore, de grandir. Une manière de dire merci au Créateur, de dire merci à la vie.

Rendre grâce

Je termine avec un terme grec. Le grec, vous vous rappelez, est la langue avec laquelle est écrit le Nouveau Testament. Savez-vous comment on dit « Merci » en grec?

« Merci », en grec, se dit « Eucharisto », du verbe « eucharistein », « rendre grâce ». Est-ce que ce mot vous fait penser à un mot français utilisé régulièrement par nos frères et sœurs catholiques?

« Eucharistie », bien sûr!

La « sainte-cène » chez notre Eglise-sœur est appelée « Eucharistie ». Une manière de rendre grâce à Dieu, de le remercier pour le don de sa vie, pour le don de la vie.

Chaque fois que nous partageons la cène, nous disons merci, nous rendons grâce. C’est un encouragement à prendre la cène avec le sourire, en rayonnant. Bien sûr, on se rappelle de la croix, mais grâce à elle, la vie nous est donnée, et on peut dire Merci.

A l’image de Naaman et du lépreux revenu vers Jésus, l’apôtre Paul nous encourage à remercier Dieu de tout notre cœur, dans tout ce que nous disons et faisons.

Lectures : Luc 10,29-37 (« Le bon samaritain » parabole de la miséricorde)

Introduction

Le bon Samaritain ! Que peut encore nous dire cette histoire cent fois rabâchée, connue par cœur. La Bible n’est-elle pas assez riche pour prêcher sur d’autres textes ? C’est un peu les pensées que me sont venues lorsque j’ai vu ce que proposait le DM pour ce dimanche. Mais en lisant le commentaire que Zaka ANDRIAMA-MPIANINA, pasteur et vice-président de la FJKM proposait, ça m’a titillé.

Le prochain

Notre frère Zaka ANDRIAMA-MPIANINA, nomme cette histoire, la « parabole de la miséricorde ». Dès le départ, ça ouvre. On ne reste pas scotché sur le Samaritain. La « parabole de la miséricorde » répond à la question « Qui est mon prochain ? ». 

Au départ, le terme « prochain » exprime simplement celui ou celle qui est proche : voisin et voisine, famille, collègue de travail, élève dans la même classe. Mais au temps de Jésus, le terme « prochain » désignait exclusivement les membres de la communauté juive (Lév 19.18).

Jésus brise volontairement cette frontière traditionnelle en choisissant comme héros un Samaritain, c’est-à-dire une personne perçue par les Juifs comme impure, étrangère, voire ennemie. 

Les Samaritains n’était pas meilleurs. Ils se considéraient comme authentiques héritiers et gardiens fidèles de la Torah.

Pour Jésus, le prochain n’est ni une catégorie ethnique, religieuse ou sociale, ni même l’humanité tout entière dans une abstraction idéale. En effet, à la question « Qui est mon prochain ? », Jésus répond par une autre : « Lequel de ces trois te semble avoir été le prochain ? » (v.36). Ainsi, le prochain n’est pas forcément celui ou celle qui est aidé.e, mais celui ou celle qui aide, qui agit avec compassion. Le Samaritain devient le modèle du prochain. Par cette inversion, Jésus nous apprend que nous devenons prochain.es pour les autres dans l’acte même de la miséricorde. Et il nous rappelle aussi, en creux, que nous avons tous et toutes besoin d’un prochain – besoin d’être aidé.es, relevé.es, accompagné.es. 

Madagascar

Or, qu’en est-il aujourd’hui à Madagascar ? Dans ce pays riche de sa diversité culturelle, mais durement éprouvé par les réalités économiques et sociales, la question du prochain se pose avec une acuité dramatique.

La majorité de la population malgache vit aujourd’hui dans une précarité profonde, notamment dans les régions rurales et reculées. Madagascar affronte une insécurité croissante. La crise alimentaire touche gravement un tiers du pays, en particulier les enfants. Dans certaines régions reculées, le taux d’analphabétisme atteint jusqu’à 90 %. Enfin, les soins médicaux de base, ne sont disponibles que pour une minorité.

Dans ce contexte, la « parabole de la miséricorde » résonne comme un appel pressant, auquel la FJKM répond au quotidien. Les enfants privés d’école, les familles démunies, les personnes isolées ou marginalisées : voilà celles et ceux qui croisent notre route aujourd’hui et attendent un geste, une présence. 

L’Eglise comme prochain

C’est précisément là que la FJKM s’investit, au quotidien, pour incarner ce modèle évangélique du prochain, non seulement en paroles mais surtout en actes concrets, auprès des populations rurales et urbaines fragilisées. Et elle ne le fait pas seule. Ce témoignage d’amour et de compassion se tisse aussi avec les paroisses de Suisse romande. Car ici aussi, nous, paroissiens et paroissiennes, comme la FJKM, sommes appelé.es à devenir prochains : non seulement en apportant un soutien financier, matériel et spirituel, mais aussi en recevant de nos frères et soeurs de Madagascar un témoignage de foi, de courage et d’engagement dans l’adversité.

Nos frères et sœurs Malgaches sont tout autant nos « prochains » par leurs témoignages courageux que nous le sommes pour eux par notre soutien.

Cette campagne 2025 est ainsi une invitation à une réciprocité vivante : chacun, chacune peut être, à tour de rôle, celui ou celle qui aide et celui ou celle qui reçoit. 

Mon prochain au-loin

À travers les projets soutenus par le DM à Madagascar, se construit un lien concret et spirituel entre les Églises partenaires. Ensemble, elles deviennent des lieux où l’Évangile se traduit dans des gestes quotidiens, où l’amour du Christ se manifeste dans des solidarités vécues, au-delà des frontières et des différences. 

Le défi lancé par Jésus dans sa parabole est donc de sortir de nos logiques égocentriques et communautaires. On est attaché à nos villages, à notre paroisse, la proximité est importante, on se connaît, les repères et l’histoire sont les mêmes. Mais Jésus nous appelle à nous ouvrir, à regarder au-delà, à aimer et à prendre soin de mon prochain au-loin, en commençant par les paroisse voisines. On a déjà vécu un petit bout de chemin ensemble entre le Pied du Jura et St-Prex-Lussy-Vufflens. Avec le culte Nomade, il y a quelques semaines, on s’est ouvert encore un peu plus. Aujourd’hui, ce culte DM nous encourage à prendre soin de nos frères et sœurs de Madagascar et de recevoir de leur part le courage de la foi.

Conclusion

Que cette Campagne d’automne soit donc pour chacun et chacune de nous une occasion de s’ouvrir à l’autre : dans les régions vallonnées de Madagascar, comme dans les paroisses des cantons romands. En agissant ainsi, nous accomplissons pleinement l’invitation du Christ à être véritablement le prochain de celles et ceux qui, chaque jour, croisent notre route en espérant une main tendue, un soutien sincère, une espérance renouvelée. 

Que Dieu nous accorde l’humilité et la force d’être ces prochains qui apportent la vie, la dignité et l’espérance. Amen.

Lectures : Deutéronome 30,15-18 ; 1 Pierre 2,11-17 ; Matthieu 11,16-19

Le jeûne fédéral est un jour « d’action de grâce, de pénitence et de prière ». Dans les cantons protestants, c’est traditionnellement l’État qui donne les règles de son déroulement – pour nous, dans le canton de Vaud, cela signifie un lundi de congé ! Mais un peu plus que ça aussi. 

Traditionnellement, les autorités décrétaient un jour de jeûne pour donner suite à un événement particulièrement important – par exemple la fin d’une guerre, en signe de reconnaissance – ou face à des périodes de crises (notamment face à des catastrophes naturelles : tremblement de terre, famines, phénomènes astrologiques).

Lors de la Diète de 1832, le jeûne fédéral a aussi été une manière de rapprocher les deux confessions dominantes (catholiques-romaines et réformées) en Suisse – un temps dédié à la paix confessionnelle en Suisse.

D’une manière ou d’une autre, le jeûne fédéral nous appelle à faire le lien entre la foi et le bien commun. Comment contribuons-nous à ce bien commun ? De quelle manière ?

Appelés à faire le bien

La première lettre de Pierre offre une impulsion très claire : nous avons à faire le bien, à avoir une bonne conduite. Même si nous ne sommes pas dans une situation avantageuse au sein de la société, même si cela ne nous rapporte pas directement quelque chose – même si nous devons en souffrir – nous sommes appelés à faire le bien.

Dans un premier temps, on se dira que faire le bien ne peut signifier qu’une seule chose : obéir à Dieu. Faire le bien, c’est faire ce que Dieu nous dit de faire – suivre sa volonté. « J’ai mis devant vous la vie et le bien, la mort et le mal : obéissez à ce que je vous dis et vous vivrez. » (Dt 30,16) C’est simple. Faites ce que je vous dis, et vous aurez une vie épanouie. Ignorez-moi et vous en subirez les conséquences. Les cartes sont entre vos mains.

Appliquer – tout simplement ? 

Ainsi, on pourrait se dire que pour faire le bien, il suffit d’appliquer. Appliquer ce que Dieu nous a mis devant les yeux. Et dans un monde qui se complexifie, où les tensions montent, où l’on ne sait plus très bien quand on est en sécurité ou non, à qui l’on peut faire confiance ou non, cette option séduit de plus en plus de monde – elle paraît claire et solide. Et l’une des tâches des fidèles est alors de se battre pour imposer l’obéissance aux lois de Dieu – jusque dans l’ordre public.

C’est une option qui a du succès – et on peut comprendre pourquoi. Elle donne de la stabilité, la conviction nécessaire pour agir, pour provoquer un changement.

Ouvrir les certitudes

Et en même temps, dans la foi chrétienne, la ce genre de stabilité est toujours fragile – on pourrait dire, fragilisée par Dieu lui-même. Au fond, Jésus nous montre que nous ne captons jamais vraiment bien ce que Dieu veut pour nous – nous ne voyons pas ce que nous devrions voir. 

Lorsque Jésus partage sa table avec des pécheurs, nous ne voyons pas le salut qui fait irruption dans le monde. Nous ne voyons pas le Christ dans sa gloire. Nous voyons un gars qui aime faire la fête – et qui en plus le fait avec les mauvaises personnes. Plus exactement : nous voyons tout ce qui va mal dans ce monde et cette société. L’inverse de ce que Dieu veut pour le monde, l’inverse du bien.

Vous rétorquerez peut-être que c’est justement celles et ceux qui n’ont pas la foi, celles et ceux qui n’ont pas compris, qui voient les choses ainsi. Il y a sans doute une part de vérité à cela. 

Mais dans l’autre sens : le peuple d’Israël, le peuple élu, a tout entre ses mains pour ne pas se planter, pour obéir à Dieu – Dieu lui a fait don de sa Parole, de sa Loi et de ses promesses. De même, les disciples avaient le maître directement à leur disposition, ont appris à la source ce que cela signifie de vivre dans la présence du Royaume de Dieu. Et pourtant, lorsque la situation devient critique, tous et toutes échouent à vivre ce bien que Dieu attend de leur part.

Faire le bien ce n’est pas – n’a jamais été – simplement une question de pure application. On peut encore voir les choses autrement – – peut-être même qu’on doit le faire.

Nous dépendons de Dieu

« J’ai mis devant vous la vie et le bien, la mort et le mal ». Le but de cette indication n’est peut-être pas tant de pointer du doigt ce que Dieu la liste que Dieu nous met sous les yeux, mais le fait que c’est Dieu qui place cette liste devant nous. Le but de cette indication du Deutéronome est aussi de renforcer notre lien à Dieu : pas de croire que nous avons la formulation du bien et du mal. Au contraire : nous ne l’avons pas. Nous devons la découvrir dans la Parole de Dieu, à l’écoute de ce que Dieu nous dit, dans la rencontre avec le Christ vivant. Nous devons écouter – nous devons prier.

Nous connaissons cette différence entre le bien et le mal, nous savons qu’il y a là un enjeu pour la vie, pour la vie de tous et de toutes. Mais nous ne maîtrisons pas cette différence – ou plutôt : quand nous pensons maîtriser cette différence, nous tordons la réalité. On se plante, on rate la cible. Alors qu’on veut à tout prix faire le bien, celui qu’on a en tête, on se retrouve à faire le mal.

Voir le bien autrement…

Ce que je dis là peut donner une impression assez désespérante : nous sommes appelés à faire le bien là où nous nous trouvons, mais nous n’avons aucune idée de comment nous y prendre pour effectivement le faire. C’est comme si nous avions une porte prévue pour nous, par laquelle nous devons passer, mais jamais la bonne clef.

C’est peut-être parce que nous continuons de voir le « bien » comme quelque chose qui requiert de la force – ce qui veut dire que si « on a le bien », c’est aussi qu’on a de la force, du pouvoir, de la légitimité, de l’autorité. Ou dans un autre sens : nous désespérons, parce que nous continuons de croire que « faire le bien » nous sauve.

Et c’est là où Jésus intervient : en déjouant nos idéaux, nos crispations, il nous libère de ce rapport bloqué au bien – qui le tourne inévitablement en « mal ».

… et juste le faire

Faire le bien ce n’est pas maîtriser une situation : c’est cultiver une écoute attentive – une attention aux rencontres concrètes, une attention à la différence entre Dieu et tout le reste ; tout ce qui prétend souvent être Dieu, mais qui ne l’est certainement pas. 

Faire le bien, vient de ce qu’on se met à l’écoute de Dieu, que nous nous tournons vers lui, que nous prions et dans ce même mouvement, Dieu nous inviter à porter notre attention aux personnes que nous rencontrons, au monde, à nous-mêmes et il nous invite à agir de manière créative, inventive – pas de manière définitive, mais de manière provisoire, en sachant que toutes nos œuvres passeront – mais que nous, nous reposons dans la main de Dieu.

Et si tout cela vous semble trop abstrait je vous propose maintenant un exercice pratique : dans le prochain mois, prenez le temps de partager un repas (chez vous, ou ailleurs, ce n’est pas cela qui importe) avec quelqu’un qui ne vous est pas proche, avec qui vous ne prendriez normalement pas le temps d’un repas. Peut-être que vous prendrez le temps d’écouter son histoire, de partager la vôtre. Peut-être que vous parlerez de la pluie et du beau temps. Peut-être que ce sera un moment agréable, peut-être pas. Peut-être que ça aidera cette personne, peut-être pas. Et retrouvons-nous plus tard pour en discuter, de cette rencontre ! 

Et dans tous les cas : prenez le temps avec Dieu, par la méditation, la prière, pour être au contact de cette liberté inépuisable – qui vous libère de devoir faire le bien, qui vous permet juste de le faire.

Elio Jaillet

Lectures : Lettres aux Romains 4,16-21 ; Psaume 130 ; Evangile selon Jean 11,17-27

Olivier Rosselet

Lettre de frère Matthew

Chaque année, pendant la période du nouvel-an, les frères de Taizé se déplacent dans une métropole européenne pour vivre le « Pèlerinage de confiance ». Ils sont rejoints par des milliers de jeunes de toute l’Europe. C’est l’occasion pour la communauté d’écrire une lettre pour accompagner l’année qui s’ouvre. Cette année, la lettre écrite par le prieur de Taizé, Frère Matthew, porte sur l’espérance ! 

Alain Rihs, m’a dit, pourquoi ne t’inspirerais-tu pas de cette lettre pour ta prédication ? Quelle bonne idée ! Et vu l’état de notre monde, le thème est de circonstance : L’espérance …

L’espérance, c’est élargir notre champ de vision, c’est croire au-delà de la raison. L’espérance nous met en marche, elle féconde nos vies.

Le courage d’espérer

Frère Matthew, durant ces voyages, a été touché par de nombreuses personnes qui vivent des choses dramatiques.

En Ukraine, un responsable d’Eglise lui a dit : la prière réveille l’espérance d’une humanité guérie. Elle donne la force de tenir bon face au découragement.

A Gaza, l’amour porte les blessés, les fragiles, comme le paralytique de l’Evangile a été porté par ses amis et par leur foi. Dans la ville de Gaza, une femme criait de colère et de désespoir. Puis reprenant ses esprits, elle sut que Dieu était là, dans la souffrance, dans le désespoir.

Au Liban, un jeune témoignait : ma mère est un témoignage d’espérance. Malgré tout, elle est toujours restée debout. C’est grâce à elle que je suis ce que je suis aujourd’hui.

Et moi, qui sont mes témoins d’espérance ?

Suis-je moi-même un témoin d’espérance ?

Un combat

L’espérance est un combat. C’est le refus de nous résigner. Je lisais il y quelques jours à la maison avec mon épouse Véronique le récit de Paul dans la tempête, alors que le bateau l’emmène à Rome. Les marins lancent à l’eau l’ancre flottante (Actes 17.27), pour rester dans la direction du vent. L’ancre, c’est le symbole de l’espérance. Dans nos églises, nous sommes comme dans un bateau, nous sommes dans la nef. Ce matin, catholiques et protestant, nous embarquons ensemble. La règle de Taizé nous exhorte à ne jamais nous résigner au scandale de la séparation des chrétiens !

Le contraire de la résignation, c’est l’espérance ! Pour garder l’espérance, nous avons besoin des uns et des autres. Ne lâchons pas notre ancre, afin de rester dans la direction de l’Esprit, qu’il puisse souffler dans nos voiles.

Source de l’espérance

Où suis-je dans ma vie ?

-   Au pied de la croix, à Vendredi-Saint ?

-   Dans l’attente, comme Samedi-Saint, un peu perdu, ne sachant pas vers quoi, vers qui, me tourner ?

-   Ou suis-je dans la joie du dimanche de Pâques ?

Quelle que soit ma situation, est-ce que je vois, s’ouvrant devant moi, un chemin d’espérance ? L’espérance n’est pas volatile, elle ne tombe pas de nulle part. L’espérance prend sa source en Jésus. Grâce à la résurrection de Jésus, nous avons la certitude que la mort n’a pas le dernier mot. Les peines de vies, les souffrances ne sont pas le point final. 

Le prophète Jérémie, alors que son pays était dévasté par la guerre, que ses habitants étaient menacés d’exil, Jérémie a acheté un champ, tant il était sûr que Dieu n’abandonnerait pas son peuple. (Jer 32.6-15)

Martin Luther, le réformateur, quand on lui a demandé ce qu’il ferait si la fin du monde était pour demain, a répondu : je planterai un arbre !

La nature aussi possède cette force de résurrection. Durant ce mois de septembre, nous vivons la saison de la Création, un temps œcuménique en faveur de la nature. Ce temps dure jusqu’au 4 octobre (demander à l’assemblée pourquoi …), anniversaire de St-François d’Assise, ce saint qui parlait aux oiseaux.

La nature peine à résister à l’impact de nos actions, de notre façon de vivre. Des pans entiers de la planète sont dévastés. Et pourtant, ça et là, la nature se révèle forte, ne se résigne pas, résiste. Adjovi-Grâce, diacre-stagiaire, que j’accompagne depuis un mois et demi, lors d’une méditation à l’extérieur, es restée scotchée devant une petite pousse qui avait trouvé moyen de fleurir sur un mur en béton, dans une faille. C’est ça l’espérance ! C’est la vie, malgré tout.

Au-delà de toute espérance

Les textes bibliques entendu tout à l’heure le disent bien. Abraham et Sara, très âgés, sans enfant, croient à la parole de Dieu. Ils espèrent au-delà de toute espérance, dit le texte. Leur foi les remplit de force. Ils sont sûr d’une chose. Ce que Dieu a promis, il est assez puissant pour le faire. Et neuf mois plus tard, Sara berce un bébé dans ses bras.

Le récit de Marthe est beau aussi. Lazarre, le frère de Marthe est décédé. Marthe en veut à Jésus de ne pas être venu plus tôt – Marthe n’a pas toujours le beau rôle dans nos prédications, dans nos homélies.

Mais là, Jésus pousse Marthe dans ses derniers retranchements. Oui, ton frère est mort, mais je suis la vie, crois-tu cela ? (pause) Et Marthe confesse sa foi, son espérance. Avant que Lazare sorte de la tombe, Marthe, puis sa sœur Marie accueillent elles aussi la vie !

A Pâques, lorsque les femmes amies de Jésus montent au tombeau, elles se posent la question. Qui nous roulera la pierre ? (Mc 16.3)

Quelles sont les pierres de nos propres vies. Quelle pierre devons-nous demander à Dieu de rouler de côté, pour qu’une vie nouvelle puisse naître en nous ?

La foi en la résurrection permet de nous accrocher à l’espérance au milieu de la détresse.

Je termine avec une parole de Dieu à Jérémie : Oui, moi le Seigneur, je connais les projets que je forme pour toi. Je le déclare, ce ne sont pas des projets de malheur. Je veux te donner un avenir plein d’espérance !

 

 

Lectures : Actes des Apôtres 16,22-34

C’est un rempart que notre Dieu
Une invincible armure.
Un défenseur victorieux,
Une aide prompte et sûre.

L’ennemi contre nous,
Redouble de courroux : 
Vaine colère ! Que pourrait l’adversaire ?
L’Eternel détourne ses coups.

(Cantique traditionnel de la Réforme)

Le chant

L’acoustique est belle dans la prison de Philippe.

Il fait sombre, humide, les rats se faufilent le long des murs de pierres. Les prisonniers sont enchaînés.

Tout d’un coup, ils entendent chanter ! Ils ont de la peine à y croire, c’est comme si le ciel descendait sur la terre. Comme si le soleil venait éclairer leur cellule, comme s’ils étaient libérés de leur chaînes.

L’apôtre Paul et son ami Silas, bien qu’ils soient en prison, enchaînés, chantent ! Ils chantent la louange de Dieu. Le chant, c’est prier deux fois, disait Martin Luther, le réformateur. Paul et Silas chantent, c’est incroyable.

Et vous, chers amis, vous les enfants, les jeunes ? Dans la même situation, vous faites quoi ?

Vous essayez de vous libérer de vos chaînes ? Vous préparez votre défense devant les juges ? Vous pleurez sur votre sort ? Vous bougez le moins possible pour ne pas raviver vos blessures, …

Paul et Silas, eux, chantent les louanges de Dieu ! Bien qu’en prison et enchaînés, Paul et Silas sont libres. Le chant est une belle manière de proclamer la liberté, la confiance, la joie, l’espérance. Pensez au Negro spirituel des esclaves dans les champs de coton.

Combien d’entre vous font partie ou ont fait partie d’un chœur durant leur vie. Et vous les enfants, à l’école, vous chantez aussi ! C’est des chouettes moments. Quand il y a une fête, un anniversaire, un repas, on chante. Le chant transforme une situation, nous fait vibrer, on n’est plus les mêmes. Le chant réconforte dans l’épreuve, donne de la force. C’est aussi pour ça qu’on chante pendant le culte.

Même la Terre est touchée par le chant de Paul et Silas. Elle aussi vibre et tremble d’émotion. Les chaînes tombent, les prisonniers sont libérés. Un miracle ! Le chant libère. Avec ce tremblement de Terre, on se dirait presque dans un film de Marvel ! (éclater le 3e ballon)

La joie

Mais ça ne semble pas être la joie pour tout le monde. Le gardien de prison a peur. Si les prisonniers ne sont plus là demain, il sera torturé, mis à mort. Il décide alors d’en finir tout de suite. Dans cette prison, tout est inversé : (lentement) Celui qui est enchaîné n’est pas celui qu’on croit. Mais Paul crie au gardien : Ne te fais pas de mal ! On est tous là.

Alors le gardien demande de la lumière, dit la Bible. Oui, le gardien a besoin de lumière, qui éclaire aussi son cœur. Paul et Silas lui parlent de Jésus, à lui et à toute sa famille. Ils reçoivent le baptême. Le gardien et toute sa famille sont remplis de joie !

La parole de Jésus, le baptême et la joie vont ensemble. Ça nous fait sortir de prison, on respire, on accueille la lumière.

Vous les enfants qui allez participer à l’éveil à la foi et aux rencontres enfances, et vous les jeunes avec les activités de KT, les camps, vous n’êtes pas des gardiens de prisons. Par contre, comme ce geôlier, vous allez vivre des choses surprenantes dans vos rencontres. Vous allez entendre des jeunes à peine plus âgés que vous, vous témoigner de leur foi. Certains vous raconteront leur baptême, et tous vous diront la joie qu’ils ont de se retrouver régulièrement, et de vivre des camps, des activités avec l’Eglise. Vous serez touchés profondément, votre terre tremblera et fera tomber des chaînes, c'est-à-dire des trucs qui vous empêchent de croire.

Nous vous souhaitons tout le bonheur du monde !

Le Repas

Et que fait le gardien de prison une fois qu’il a reçu le baptême ? Mmh ? (attendre)

Il offre un repas à Paul et à Silas. Le « repas », comme le « chant », s’invite aux fêtes, aux événements aux anniversaires. Quand on est invités ou qu’on reçoit du monde à la maison, on se retrouve toujours autours de la table. On rigole, on raconte, on écoute, on est heureux !

Aujourd’hui aussi, dans cette grande salle, on chante et on se retrouve autour d’un repas. C’est la fête !

La Bible est truffée de ces fêtes où les gens se rassemblent autour d’un repas. La nourriture symbolise les dons et la générosité du ciel. Dans un repas, les produits viennent de Dieu et son apprêtés par nous, enfants, jeunes, hommes, femmes.

Quand Dieu parle de la Terre promise, il dit : une terre où coulent le lait et le miel. Le lait et le miel, c’est plus que de l’eau et du pain, c’est goûteux. Le miel, à l’époque, remplaçait le sucre d’aujourd’hui. Dieu aime ce qui bon, ce qui est savoureux. D’ailleurs, au repas tout à l’heure, vous savourerez une sauce au miel !

Si « chanter », c’est prier deux fois, « cuisiner » c’est aussi prier. Une prière pour dire merci. Aujourd’hui, plusieurs maraîchers, vignerons, arboriculteurs nous offrent leurs produits. Vous trouverez leur production au stand fruits et légumes. C’est la fête des récoltes, on fête toutes ces bonnes choses que la nature fait pousser et nous offre. Nous pouvons les savourer sur place ou les cuisiner, les apprêter. La nature nous donne le meilleur. Merci Seigneur !

Cette année, nos jardins ont été généreux et la vendange s’annonce belle. Emerveillons-nous, soyons reconnais-sant et prenons soin de cette Création qui chante, nous nourrit et nous aide à respirer mieux, c’est un précieux cadeau de Dieu.

Amen

Y a d'la joie
Bonjour, bonjour les hirondelles
Y a d'la joie
Dans le ciel par-dessus le toit
Y a d'la joie
Et du soleil dans les ruelles
Y a d'la joie,
partout y a d'la joie

(Charles Trenet, Y a d'la joie)

 

 

Pensée du jour

En matière de souffrance et de patience, mes frères, prenez pour exemple les prophètes qui ont parlé au nom du Seigneur. (Jacques 5,10)

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