Le Conseil Solidarités de la région Nord-Vaudois a eu un temps d’échange sur la façon dont la solidarité s’articule avec nos propres besoins en paroisse. Un constat s’impose : d’un côté, des églises un peu trop vides, peu de jeunes familles réformées, beaucoup de bras forts manquants ; de l’autre, des personnes ayant tout quitté, avec parfois du temps libre, l’énergie de la jeunesse et un profond besoin de rencontre. Une tendance se développe et elle nous interroge : celle d’inviter des personnes du secteur migration à aider les projets paroissiaux.
L’entraide est au cœur de notre dynamique, et nous sommes touché·es chaque fois qu’une personne se sent assez en confiance pour contribuer à un projet si éloigné de son propre horizon. Derrière le visage d’un Kurde venu déplacer quelques tables et bancs se cache toute une histoire, une humanité avec ses contours et ses abîmes. On reçoit là quelque chose qui ressemble à un cadeau inattendu, offert par quelqu’un qui, a priori, n’avait rien à apporter… un peu comme ces mages venus d’ailleurs, étrangers à la terre d’Israël, qui déposent des présents devant un enfant qui ne leur appartient pas.
Lorsque Jésus nous dit qu’il est l’étranger qu’on recueille, il n’ajoute pas : « mais uniquement s’il file des coups de main à la paroisse ». Et pourtant, c’est parfois ce que nous croyons entendre lorsque, en Église, nous sollicitons des personnes en migration ou en grande précarité pour rendre un service, sans envisager cette démarche dans une véritable relation réciproque. Une rencontre où chacune et chacun s’enrichit : par le temps donné, par le temps reçu, par tout ce qui se transmet sans qu’on l’ait prévu.
Une relation qui ressemble davantage au geste des mages qu’à une logique utilitariste : donner non pas parce qu’on doit, mais parce qu’on reconnaît en l’autre une présence qui vaut le déplacement.
Ce “win-win”, cet échange circulaire, c’est ce qu’ont vécu les bénévoles lors de la venue de la Marelle fin octobre. Après avoir bénéficié de bras et de jambes supplémentaires grâce à Mika et Dandros (noms d’emprunt), le repas partagé dans la salle de paroisse a permis à toute l’équipe de vivre un moment de découverte et de douce fraternité. On pensait avoir reçu de simples coups de main : on a reçu, en réalité, un peu de ces cadeaux venus d’ailleurs, qui élargissent le cœur de celles et ceux qui les accueillent.
Les ministres et le Conseil Solidarités souhaitent accompagner, favoriser et multiplier ce type de démarches.
Que ce temps de l’Avent et de Noël nous permette de sentir comment bergers et mages convergent ensemble vers la même crèche : ceux qui viennent des champs et sentent la laine mouillée, et ceux qui viennent de très loin avec leurs coffres remplis. Tous deux sont des étrangers étranges, mal aimés du peuple, et pourtant accueillis par Dieu dans le premier cercle autour de la naissance — dans cet élan qui a rassemblé une belle diversité, humaine et animale. L’enfant de Bethléem, Jésus, l’ami des étrangers et des exclu·es, celui qui s’est toujours assis à leur table… et qui continue encore aujourd’hui de révéler sa présence là où nous apprenons à accueillir, à recevoir et à nous laisser surprendre… sans rien attendre d’autre qu’une rencontre.
Signé : Sandro Restauri et Joan Charras-Sancho