« Vous êtes la lumière du monde ! »

Lecture de Mat 5, 13-16 : Vous êtes le sel et la lumière du monde

13C'est vous qui êtes le sel du monde. Mais si le sel perd son goût, comment le rendre de nouveau salé ? Il n'est plus bon à rien ; on le jette dehors, et les gens le piétinent.14C'est vous qui êtes la lumière du monde. Une ville construite sur une montagne ne peut pas être cachée. 15On n'allume pas une lampe pour la mettre sous un seau. Au contraire, on la place sur le porte-lampe, d'où elle brille pour tous ceux qui sont dans la maison. 16C'est ainsi que votre lumière doit briller aux yeux de tous, afin que chacun voie le bien que vous faites et qu'ils louent votre Père qui est dans les cieux.

Prédication : « Vous êtes la lumière du monde ! »

Résumé :  Dans un monde souvent sombre, la bonne nouvelle annoncée par Jésus Christ rappelle que nous sommes tous et toutes, et ensemble, la lumière du monde, signe de la valeur infinie que Dieu nous porte. Cela nous donne aussi une grande responsabilité de cet appel à témoigner au monde de cette lumière par des actes concrets.

Une prédication à écouter ici: https://anchor.fm/emlklsne/episodes/Vous-tes-la-lumire-du-monde-e1ujmqu


Chers frères et sœurs en Christ,

 « Vous êtes la lumière du monde ! » Vous imaginez être là, devant Jésus prêchant les béatitudes puis s’adressant à la foule en ces termes : « Vous êtes la lumière du monde ! » Euh… vous êtes sûr ? Moi ? Nous ? Lumière du monde ? j’ai pas le profil pour ce poste. Moi, je suis, si l’on peut dire, à des années-lumière d’être une lumière ! Seigneur, si tu veux des gens brillants, prends mon voisin de gauche, celui qui est si drôle, ou ma voisine de droite, celle qui est si souriante, mais moi, non… Comme me disait mon grand frère (qui a beaucoup d’humour) : « si tu n’as jamais été une lumière c’est peut-être parce que t’étais niais ».

Plus sérieusement. Bien souvent, nous avons tendance à nous rabaisser. Vous savez, cette petite voix qui dit que vous y arriverez pas, que vous êtes pas assez ci ou pas assez ça. Cette petite voix qui dit que ce que vous faites, ce n’est pas suffisant. Comme dans le gospel « You say », que nous avons chanté tout à l’heure. Je continue de combattre des voix dans ma tête qui disent que je ne suis pas suffisant. Chaque mensonge me dit que je ne serai jamais à la hauteur. Alors moi, la lumière du monde ? non, ce serait trop prétentieux, je laisse cela aux orgueilleux, comme disait d’ailleurs ce panneau devant mon bistrot préféré : « Si tous ceux qui se prenaient pour des lumières la mettaient en veilleuse, ce serait déjà une belle contribution écologique… » Non moi, je suis juste… moi. Un moi au présent bien imparfait… Et si vraiment j’en suis une, de lumière, j’en suis une petite, fragile, vacillante, qui risque de s’éteindre au moindre coup de vent. Tiens, j’en suis une qui clignote, parfois je laisse passer la lumière de Dieu, parfois pas.

Oui, bien souvent, nous sommes les premiers à nous juger, à nous rabaisser, à ne pas croire en nous.

Mais Dieu, lui, il croit en nous. Il croit en toi, mon frère, il croit en toi, ma sœur. Devant nos faiblesses, il sourit. Et nous encourage. Il sait de toute éternité qu’en choisissant l’humain pour partenaire, il s’associe à des êtres faillibles, mais malgré cela il place sa confiance en nous. C’est pourquoi Jésus dit : « C’est vous, qui êtes la lumière du monde », c’est vous, pas quelqu’un d’autre, pas d’autres personnes. C’est vous, y compris toutes les fois où vous vous sentez un peu ternes, un peu fades, pas trop lumineux. Parce qu’au fond, la lumière que nous devons faire briller, ce n’est pas nous qui l’émettons, c’est Dieu. Nous n'avons pas à être brillants, sa Parole l’est pour nous. Il nous suffit de la tenir haut, comme un flambeau. Et de chercher à faire le bien, et le grand patron fera le reste.

Oui vraiment, quelle bonne nouvelle que cette phrase : « c’est vous qui êtes la lumière du monde » (et le sel de la terre). Avec cet encouragement, le Christ nous redit l’infinie valeur de chacune et chacun aux yeux de Dieu. Mais bien plus encore, cette phrase exprime aussi une responsabilité qui nous est confiée : celle de faire briller cette lumière.

Car les auditeurs de l’Evangile de Matthieu l’ont entendu dans le passage qui précède, avec cette proclamation paradoxale des béatitudes : le bonheur se reçoit au cœur de l’épreuve, dans une situation de manque et d’humilité. J’aime cette traduction poétique de Chouraki qui dit l’appel à l’espérance de ce texte, en substituant au « bienheureux » habituel, un « en marche » ! En marche les endeuillés, en marche ceux qui sont dans le manque! Comme pour dire le mouvement vers l’espérance que constitue la bonne nouvelle de Jésus Christ. MLK le disait à sa manière : "Nous devons accepter une déception limitée, mais ne jamais perdre un espoir illimité". Oui l’Evangile est une espérance constante qui chaque jour, nous remet en marche.

En marche, frères et sœurs : comme une invitation à apporter, à nos frères et sœurs en humanité dans le monde, sel et lumière. Le sel, c’est ce qui purifie et donne du goût aux choses, et à la vie ! La lumière, elle, permet de révéler le chemin. Car si on est dans les ténèbres, tout est confus, mais lorsqu’on allume la lumière, la couleur de chaque objet se révèle.

Ayant dit cela, j’aimerais faire ici quelques remarques sur ce texte bien connu :

1) Jésus ne dit pas « tu » mais « vous ». Autrement dit, être sel et lumière est une affaire communautaire, ce n’est qu’ensemble que nous pouvons témoigner d’une lumineuse espérance. Au fond, c’est un peu comme quand on chante dans une chorale, n’est-ce pas les amis ? Tout seul, difficile d’être lumière du monde, moi je ne suis pas toujours très sûr de moi quand je chante, je galère un peu pour trouver les notes, mais quand je suis dans la chorale ça change tout. Ensemble nous devenons lumière du monde.

2) Jésus ne dit pas « vous êtes des lumières ou vous êtes du sel » mais bien vous êtes « le » sel de la terre et « la » lumière du monde. Il n’en propose pas d’autres. Jésus croit que le Royaume de Dieu vient au travers d’hommes et de femmes comme vous et moi. C’est dire la confiance qu’il nous fait !

3) Jésus n’use pas d’un impératif : « devenez ou soyez le sel de la terre ou la lumière du monde » mais de l’indicatif : « vous l’êtes, vous qui m’écoutez et qui mettez en pratique mes paroles ». Jésus fait un constat. Quelle bonne nouvelle. Une bonne nouvelle qui ouvre sur un engagement pour le monde.

Car oui, on ne saurait répéter combien aujourd’hui le témoignage des chrétiens est important dans notre monde actuel où règnent la peur, la guerre et le non-respect des humains. Témoigner de sa foi, c’est oser dire symboliquement « je ne suis pas d’accord avec ce qui se passe dans le monde, je ne veux pas avoir peur mais confiance en Celui qui m’a créé et qui me donne l’espérance d’une Vie plus forte que la mort. » Comme disait MLK : « L’obscurité ne peut pas chasser l’obscurité, seule la lumière le peut. » A nous d’apporter humblement cette lumière qui nous vient de Dieu.

Alors pour conclure ce matin, je vous pose cette question qui vous est adressée de manière personnelle autant que communautaire : comment pouvez-vous donner du goût et de la lumière à la vie des autres ? (silence) Ce n’est pas une question en l’air, mais bien concrète. Je vous invite cette semaine à essayer de faire UNE chose, pas deux, pas trois, mais UNE chose pour donner du goût et de la lumière à la vie d’une personne. Pas besoin d’action héroïque, mais par des gestes simples d’écoute, de tendresse, de respect, des gestes qui peuvent redonner de la dignité, de l’amour, de la joie, chercher à faire le bien. Comme ici dans cette Eglise MLK. Car c’est bien notre responsabilité: Dieu compte sur nous !

Alors chers frères et sœurs, même si vous ne vous sentez pas des lumières, n’oubliez pas que votre petite lumière est là et qu’il faut la laisser briller. « This Little light of mine », c’est un grand classique des gospels et un hymne du mouvement des droits civiques aux USA dans les années 1960s. A la fois un condensé d’Evangile et un hymne non-violent encore chanté récemment en 2018 à Charlottesville dans une contre-manifestation d’anti-racistes s’opposant à une démonstration de force de suprémacistes blancs. Très émouvant de les entendre chanter : « This little light of mine, I am gonna let it shine”: « Cette petite lumière en moi, je la ferai briller », une exhortation pour chacune et chacun.

Alors frères et sœurs, en marche, avec votre petite lumière, et laissez-la briller, cette lumière, avec des actes concrets, « afin que chacun voie le bien que vous faites et qu'ils louent votre Père qui est dans les cieux ». Oui chers frères et sœurs, à vous de trouver votre manière de mettre l’Evangile… en lumière !

Amen.

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