« Souvenez-vous de la femme de Loth » (07.09.25)

Lecture de Genèse 19 : Loth échappe à la destruction de Sodome

15Aux premières lueurs du jour, les anges pressèrent Loth de partir : « En route ! disaient-ils. Prends ta femme et tes deux filles, sinon vous perdrez la vie quand la ville paiera ses crimes. » 16Loth hésitait encore. Les anges le prirent par la main, ainsi que sa femme et ses deux filles, et le conduisirent hors de la ville, car le Seigneur voulait le sauver.

17Lorsqu'ils les eurent fait sortir de la ville, l'un des anges dit à Loth : « Fuis pour sauver ta vie ; ne regarde pas en arrière ; ne t'attarde nulle part dans la région ; réfugie-toi dans la montagne si tu veux rester en vie. » 18Loth répondit : « Non, mon seigneur, ce n'est pas possible. 19Bien sûr, j'ai bénéficié de ta bienveillance et tu m'as fait une grande faveur en me sauvant la vie. Mais moi je n'aurai pas le temps de fuir jusque dans la montagne : le malheur va m'atteindre, et je mourrai. 20Tu vois cette petite ville ? Elle est assez proche pour que je puisse courir jusque-là. Laisse-moi m'y réfugier puisqu'elle est si petite, et j'aurai la vie sauve. » – 21« Eh bien, dit l'ange, je t'accorde encore cette faveur de laisser intacte la ville dont tu parles. 22Va vite t'y réfugier, car je ne puis rien faire avant que tu y sois arrivé. » – C'est pourquoi on a appelé cette ville Soar. –

23Le soleil se levait quand Loth arriva à Soar. 24C'est alors que le Seigneur fit tomber des cieux sur Sodome et sur Gomorrhe une pluie de soufre enflammé. 25Il soumit à un total bouleversement ces deux villes et leur population, ainsi que toute la région et sa végétation. 26La femme de Loth regarda en arrière et fut changée en statue de sel.

 

Prédication : « Souvenez-vous de la femme de Loth »

Résumé : Malgré la violence du péché d’inhospitalité de Sodome, Loth hésite à fuir, attaché à son ancienne vie. Sa femme aussi n’obéira pas à l’injonction des anges et se retournera pour voir la ville en flamme. Elle sera transformée en statue de sel. Nous aussi bien souvent nous pouvons être attaché au passé, comme avec cette phrase « c’était mieux avant ». Pourtant cette nostalgie du passé (même violent et pécheur), n’est pas porteuse de vie. Au contraire, elle fige, elle empêche d’avancer. Le texte de Genèse nous invite à oser quitter avec confiance nos esclavages du passé pour un nouvel exode, pour la Vie ! 

Prédication à écouter ici.

 

Chers frères et sœurs en Christ,

Qui parmi vous est du club des CMA « c’était mieux avant » ? Vous savez, quand un soupir à la bouche, vous vous mettez à dire : « ah… le bon vieux temps » ?

Par exemple en regardant ces objets d’un autre temps : ce couteau électrique, ce mercurochrome, ces diapo, ces séparateurs de pièces, ce fameux téléphone à fil.

  • C’était mieux avant… quand on avait des cartes routières à lire pour pas se paumer !
  • C’était mieux avant… pas de portable, pas de tablette, juste des personnes qui vivent pleinement le moment présent
  • Les moulins, c’était mieux… à vent !
  • Car comme disait mon ami Jacques, ce que je préfère avec le bon vieux temps, c’est que je n’étais pas « bon » et que je n’étais pas « vieux ».

Le bon vieux temps. Ou la nostalgie. Un mème qui résume cela c’est pour moi c’est celui-ci, issue du dessin animé Ratatouille. Le principe de la madeleine de Proust. On croque un met, sent une odeur, on écoute un vieux disque et on se retrouve en enfance. Nostalgie des plats de grand-maman, nostalgie de l’insouciante enfance, nostalgie des années folles de jeunesse.

Le texte biblique que nous avons entendu ce matin nous parle justement de nostalgie et du « c’était mieux avant ». Mais il nous parle aussi de péché, celui du peuple de Sodome tout entier. Et bien souvent, ce texte a été mal compris, ou instrumentalisé, pour parler de l’homosexualité. Qu’en est-il vraiment ?

Pour la petite histoire, j’ai travaillé ce texte quand j’étais étudiant à l’UNIL, il y a presque 20 ans, et c’était une joie pour moi de me replonger dans ce texte célèbre, mais difficile, et de voir aussi que le pasteur devant vous n’a guère changé, puisqu’à l’époque j’avais dit dans mon texte : « pour vous parler de Loth je n’ai pas a Loth of time »… Voilà voilà.

A) Le péché de Sodome

Commençons donc par le péché de Sodome. Si vous lisez l’entier de Genèse 19, vous vous rendez compte qu’on est face au Mal fondamental qui est présent dans la Genèse. Ayant dit cela, il me semble nécessaire de poser tout de suite quelque chose d’essentiel : Dieu n’a pas détruit Sodome pour détruire les homosexuels. En fait, pour moi, ce texte n’a pas grand-chose à voir avec l’homosexualité telle que nous la comprenons aujourd’hui, c’est-à-dire comme un amour (ou une attirance physique) entre deux personnes du même sexe, mais il traite plus de la violence des habitants de Sodome, dont la sexualité déviante (viol d’autres hommes) en est un aspect. Il n’y a ici aucune réflexion sur la valeur morale de l’homosexualité, mais sur l’orgueil, l’agressivité et l’inhospitalité de Sodome. Et cela est souligné par le fait que les invités sauvent Loth qui a si vaillamment défendu l’hospitalité. 

Le péché de Sodome, ce n’est donc pas celui de l’homosexualité, mais c’est celui de l’inhospitalité. De la violence. On a affaire à une sorte de pogrom, de foule violente surexcitée qui veut maltraiter les visiteurs. Mais qui, aussi, fait preuve d’orgueil et d’arrogance, ne voulant pas aider les pauvres alors qu’ils sont riches. D’ailleurs ce n’est pas autre chose que dit Ezéchiel : Voici quel a été le crime de Sodome, ta soeur. Elle avait de l'orgueil, elle vivait dans l'abondance et dans une insouciante sécurité, elle et ses filles, et elle ne soutenait pas la main du malheureux et de l'indigent. (Ez 16, 49)

  • Quand dans ma vie suis-je comme le peuple de Sodome, inhospitalier et violent, orgueilleux et arrogant ?

B) Partir, comme un nouvel exode 

Au verset 3, Loth offre du pain sans levain, indiquant – avec la fuite précipitée qui va suivre – que la sortie de Loth de Sodome est comme un nouvel Exode rappelant la sortie d’Égypte. Une fuite POUR LA VIE, comme il est dit au verset 17 : « Fuis pour sauver ta vie » disent les anges. Autrement dit, c’est ta vie qui est en jeu.

  • Quand dans ma vie suis-je attaché à mes esclavages, et suis-je prêt à les quitter « pour la vie » ?

C) Pourquoi Loth a-t-il de la peine à partir ?

Alors nous pouvons nous poser la question : mais pourquoi DIANTRE Loth a-t-il de la peine à partir ? 

Une partie de la réponse réside dans le fait que Loth s’était installé à Sodome pour profiter des richesses de la ville. En effet, Sodome était une ville prospère située dans une plaine fertile.

Dès lors, on comprend mieux que Loth tarde à partir. Il laisse passer la nuit. Au fond, il ne voulait pas quitter, il hésitait. 16Loth hésitait encore. Les anges le prirent par la main, ainsi que sa femme et ses deux filles, et le conduisirent hors de la ville, car le Seigneur voulait le sauver. Loth n’arrive pas à partir de lui-même. Il résiste, tant il est attaché à son passé.

D) La femme de Loth qui se retourne

Sa femme va encore un cran plus loin. Alors que l’injonction de ne pas se retourner, de ne pas regarder en arrière était clair, elle ne parvient pas à obéir. Son cœur était toujours dans la ville. Si nous ne connaissons pas le nom de cette femme, elle est restée célèbre. Jésus y fait référence en Luc 17,32. « Souvenez-vous de la femme de Loth », invitant à ne pas succomber à la tentation de la nostalgie. 

  • Quand dans ma vie suis-je comme la femme de Loth, nostalgique, me retournant sans cesse pour regarder mon passé ?

E) La symbolique de la statue de sel

Et la femme de Loth est punie pour sa désobéissance, pour sa nostalgie mortifère, et se voit transformée en statue de sel. Avouez que pour un petit regard en arrière, l’addition est, si j’ose dire, salée. Pourquoi en statue de sel ? Deux niveaux de réponse.

D’abord à un niveau historique, étiologique même. Ah, vous connaissiez ce mot « étiologique » ? En géologie, le terme "étiologique" désigne l'étude des causes et des origines des phénomènes géologiques tels que les roches, les structures du relief ou les événements passés. Ainsi, on peut comprendre ce récit comme une explication de la géologie particulièrede ces lieux : l’étonnante existence de cette ville au sud de la Mer Morte (alors que tout le reste de la région apparaît comme dévasté), et surtout la transformation de la femme de Loth en colonne de sel pourrait donner une explication à l’existence d’étranges formations rocheuses de la région.

Ensuite à un niveau symbolique, être constamment nostalgique du passé, se retourner sans cesse vers le passé, suggère qu’il y a un rapport au passé qui nous rend stérile comme du sel, un rapport au passé qui pétrifie notre présent et compromet notre avenir, un rapport au passé qui dessèche notre vie et la rend inféconde. Oui chers frères et sœurs, parfois la nostalgie bloque notre présent, mais surtout elle empêche d’avancer pour que notre futur puisse advenir. 

Attention : il n’est pas question de fuir le passé ou de manquer au devoir de mémoire, mais il s’agit de reconnaitre, simplement, qu’il se forge parfois en nous un rapport au passé et à la mémoire qui rend stérile… 

  • Quand dans ma vie suis-je comme la femme de Loth, rendu stérile par la nostalgie, comme pétrifié, m’empêchant d’aller de l’avant ?

F) Et nous ?

Chers frères et sœurs, imaginez un instant que votre maison brûle (c’est la signification littérale de Sodome : « qui brûle »). Vous arrivez devant la maison : que faites-vous ? allez-vous récupérer des objets ? Facile à dire que non, mais l’attachement au passé est fort… La puissance de la nostalgie est dangereuse. C’est ce que nous dit ce texte : il faut parfois laisser le passé derrière, même si c’est difficile, et regarder de l’avant, vers un futur porteur de vie.

Ainsi ce texte de Genèse 19 nous invite à oser quitter avec confiance notre passé sans nostalgie pour un nouvel exode, pour la Vie !

Oui chers frères et sœurs, la bonne nouvelle c’est qu’un avenir nous est promis. Alors regardons devant. Et allons ! Au fond, ce texte nous invite à faire confiance aux anges de Dieu qui cherchent à nous sortir de nos esclavages, de nos conforts aussi, pour la Vie. Pour que nous puissions dire : c’était mieux… demain !

Amen.

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