Le SEIGNEUR m'a engendrée, prémice de son activité, prélude à ses œuvres anciennes.
J'ai été sacrée depuis toujours, dès les origines, dès les premiers temps de la terre.
Quand les abîmes n'étaient pas, j'ai été enfantée, quand n'étaient pas les sources profondes des eaux.
Avant que n'aient surgi les montagnes, avant les collines, j'ai été enfantée,
alors qu'Il n'avait pas encore fait la terre et les espaces ni l'ensemble des molécules du monde.
Quand Il affermit les cieux, moi, j'étais là, quand Il grava un cercle face à l'abîme,
quand Il condensa les masses nuageuses en haut et quand les sources de l'abîme montraient leur violence ;
quand Il assigna son décret à la mer – et les eaux n'y contreviennent pas –, quand Il traça les fondements de la terre.
Je fus maître d'œuvre à son côté, objet de ses délices chaque jour,
jouant en sa présence en tout temps, jouant dans son univers terrestre ;
et je trouve mes délices parmi les hommes.
Proverbes 8, 22-31
« Je faisais Ses délices jour après jour,
jouant devant Lui à tout moment,
jouant dans l’univers, sur Sa terre,
et trouvant mes délices avec les fils des hommes. »
Frères et sœurs,
celle qui parle ainsi, c’est la Sagesse de Dieu.
En général, quand on parle de sagesse,
on imagine quelqu’un d’un certain âge qui a de l’expérience.
Quelqu’un de posé
qui ne s’enflamme pas pour un oui pour un non.
Quelqu’un de réfléchi qui voit aussi les impensés,
ces points aveugles qui cachent souvent de grands problèmes.
Une grande stabilité. Une assise solide.
On sait où l’on est,
et l’on ne va pas se lever comme ça
pour suivre la première idée venue.
Un sourire paisible qui dit :
« J’en ai déjà vu d’autres. Inutile de se monter la tête avec ça. »
« Je faisais Ses délices jour après jour,
jouant devant Lui à tout moment,
jouant dans l’univers, sur Sa terre,
et trouvant mes délices avec les fils des hommes. »
Vous l’avez entendu :
la Sagesse de Dieu passe son temps à jouer.
C’est ainsi qu’elle contribue à l’œuvre de la création.
Étonnant, non ?
La Sagesse, dont la principale caractéristique est le jeu.
Ou, pour le dire autrement :
dans le monde de Dieu, être sage, c’est jouer.
Et pas forcément jouer sagement, comme on dit aux enfants.
C’est un retournement complet.
La Sagesse,
non pas comme retenue, mesure, modération, pondération,
mais au contraire comme élan, légèreté,
peut-être même ivresse,
en tout cas amusement.
Non pas un sourire impassible,
mais le rire qui jaillit.
Non pas un vieillard qui a tout vu,
mais un enfant qui ne cesse de découvrir et d’inventer,
et qui transforme tout par la magie de son imagination.
Refusant les limites du monde des adultes,
si rationnel, et en même temps si pauvre.
Rappelez-vous les mondes que l’on arrivait à créer
avec deux ou trois bouts de bois
et quelques centimètres de ficelle.
Rappelez-vous le temps que l’on ne voyait pas passer
à explorer les pâquerettes du jardin ou l’écorce d’un arbre.
Tout était si frais, si neuf, si vaste.
La sagesse de Dieu comme cet émerveillement
qui ne se satisfait pas du regard des adultes,
et qui ne comprend pas
pourquoi, un ver de terre, ce serait sale,
et quel problème il y a à avoir les vêtements couverts de boue,
ou même troués.
« Je faisais Ses délices jour après jour,
jouant devant Lui à tout moment,
jouant dans l’univers, sur Sa terre,
et trouvant mes délices avec les fils des hommes. »
La Sagesse, non pas comme un sourire distant et énigmatique,
accompagné d’un hochement de tête qui dit :
« Oui, je sais ! »
La Sagesse comme cette énergie incroyable des enfants
qui n’arrêtent pas de découvrir de nouvelles idées,
de nouvelles réalités, de nouveaux chemins.
Un monde inépuisable où les yeux ne sont jamais rassasiés,
où le cœur n’est jamais repu.
Ce que nous appelons sagesse,
c’est trop souvent une forme de fatigue.
Une façon de dire :
« À quoi bon ? Autant rester assis là où l’on est.
Ne rien faire, c’est ne rien gâcher. »
Dieu nous invite à une autre approche.
Non pas la circonspection, mais la fraîcheur.
Non pas la réflexion, mais l’élan.
Quand Jésus dit à ses disciples :
« J’ai encore beaucoup de choses à vous dire,
mais pour l’instant vous ne pouvez pas les porter »,
il ne dit pas qu’ils n’en savent pas assez long,
mais bien qu’ils réfléchissent trop.
C’est l’Esprit qui leur permettra
d’entrer dans la Vérité tout entière :
non pas un exposé, un enseignement,
mais une impulsion, un souffle, un feu, une envolée.
De la générosité et de la confiance.
De la simplicité et de la joie.
Dans notre monde si sérieux,
on voit partout des problèmes qu’il faut affronter et régler.
Des obstacles qu’il faut écarter.
Un enfant ne voit pas de problèmes ou d’obstacles.
Il voit des occasions.
Une grosse flaque sur son chemin ne représente pas le danger
de mouiller ses chaussures et son pantalon.
C’est une merveilleuse rencontre avec l’élément liquide
qui reflète la lumière
et qui réagit aux impulsions qu’on lui donne :
ces vaguelettes qui se forment à la surface
quand on y lance quelque chose ;
et bien sûr ce jaillissement
quand on saute les deux pieds dedans.
Tout un monde, tout un univers
qu’il serait dommage de ne pas explorer !
Peut-être que ce que, nous, nous voyons
comme des problèmes, comme des obstacles,
on pourrait le traiter comme les enfants traitent
une grosse flaque d’eau.
Non pas une source de stress,
mais une occasion de jeu.
Sortir de nos ornières pour avoir un regard neuf,
et un cœur libre, disponible,
tout sauf déjà formaté.
Il y a tant de possibilités qui se présentent à nous chaque jour.
Tant d’appels que Dieu nous lance.
Et nous ne les percevons pas,
parce que cela n’entre pas dans nos schémas.
Cette sagesse de celui qui a tout vu, tout compris.
La Sagesse de Dieu, elle, ne réfléchit pas : elle s’amuse.
Pas de programme, de planification, de PVs.
Mais la liberté, la disponibilité, la souplesse
d’une joie que rien ne peut décourager
et qui trace son chemin sans refuser les obstacles,
mais en les transformant en singularités,
non seulement dignes d’intérêt, mais aussi porteuses de vie.
Puisse l’Esprit de Dieu
nous libérer de notre sagesse humaine,
si souvent stérile à force de prudence et de calculs.
Puisse-t-Il surtout nous revêtir de la vraie sagesse d’en haut,
celle qui se plaît dans le jeu, dans la joie.
La sagesse si féconde des enfants,
et aussi de ce Dieu tellement plus jeune qu’on l’imagine.
Amen